L'ORDRE DE
DIEU
II
- Tu ne te feras
point d'images taillées
par J.-Ph. RAMSEYER
Tu ne te feras point
d'image taillée, ni aucune
représentation des choses qui sont
là-haut dans les cieux, ici-bas sur
la terre ou dans les eaux au-dessous de la
terre. Tu ne te prosterneras point devant
elles, et tu ne les serviras point; car je
suis l'Éternel ton Dieu, un Dieu
jaloux, qui punit l'iniquité des
pères sur les enfants,
jusqu'à la troisième et
à la quatrième
génération de ceux qui me
haïssent et qui fait
miséricorde jusqu'à mille
générations à ceux
qui m'aiment et qui gardent mes
commandements.
Exode 20/ 4-6.
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Il ne nous suffit pas de savoir que Dieu est,
encore faut-il savoir ce qu'il est. Nous sommes
tentés pour cela de nous en faire une image,
une idée, une représentation
quelconque à l'analogie du monde
créé. Nous réclamons, comme le
peuple d'Israël « un dieu qui marche
devant nous », dont la réalité
nous soit sensible et qui ait quelque commune
mesure avec nous. Nous sommes ainsi naturellement
portés, non seulement à adorer de
faux dieux, « d'autres dieux », mais
encore à nous faire une fausse image du
vrai. Et il arrive que, voulant servir Dieu, nous
servons en fait une idole, la plus subtile et la
plus dangereuse de toutes, puisqu'elle veut
être l'image du Dieu unique.
Or, il n'appartient pas à l'homme
de se représenter Dieu, mais bien de
recevoir et d'accepter la révélation
de Dieu par lui-même. Et voilà
pourquoi le deuxième commandement
s'accompagne d'une déclaration par laquelle
Dieu révèle ce qu'il est : non pas le
Dieu que tu t'imagines, que tu te
représentes ou que tu souhaites, non pas le
dieu de tes mains, de tes pensées, de ton
coeur ou encore de tes
rêves, mais « l'Éternel ton Dieu,
un Dieu jaloux, qui punis l'iniquité des
pères sur les enfants jusqu'à la
troisième et la quatrième
génération de ceux qui me
haïssent, et qui fais miséricorde
jusqu'en mille générations à
ceux qui m'aiment et qui gardent mes commandements.
»
On explique souvent le deuxième
commandement sans tenir compte de cette
déclaration qui l'accompagne. Elle ne se
trouve cependant pas là fortuitement. En
effet, Dieu ne se contente pas simplement de nous
défendre toute représentation ou
toute spéculation à son sujet, mais
il vient en aide à notre ignorance et
proclame lui-même ce qu'il est. Il se
révèle en même temps qu'il fixe
les limites de notre connaissance; il donne ce
qu'il ordonne. Il affirme qu'il est Dieu, il marque
la distance qui le sépare de l'homme, il
établit la dépendance de la
créature à l'égard du
Créateur, il rappelle sa souveraineté
: voilà ce que je suis, par
conséquent tu ne te feras pas d'image
taillée ...
Je suis l'Éternel ton Dieu, celui
qui a toute la puissance et toute
l'autorité, celui qui est la source de toute
connaissance et de toute révélation
parfaite, mais celui aussi qui est ton Dieu, celui
qui t'aime et qui s'est donné pour toi en
son Fils Jésus-Christ. Non pas donc un Dieu
lointain, étranger, suprêmement
détaché de la terre et de ses
misères, mais un Dieu qui s'est
abaissé jusqu'à moi et à ma
misère et qui m'a dit, par
Jésus-Christ: je suis ton Dieu !
Prenons bien garde à ceci : Dieu
n'attend pas d'être obéi avant
d'aimer, avant de faire grâce, avant
d'être notre Dieu. Mais il fait grâce
d'abord, pour être obéi ensuite. Ce
n'est donc pas par le mérite de nos oeuvres
ou de notre obéissance à ses
commandements que nous sommes
sauvés et qu'il devient notre Dieu. Mais il
nous fait la grâce de son amour,
gratuitement, sans poser d'abord de conditions, car
il est avant tout amour. Et c'est parce qu'il nous
aime, parce qu'il nous fait grâce avant
même que nous ayons fait quoi que ce soit
pour lui plaire, qu'il nous donne son commandement
... Ce n'est pas pour nous effrayer ni pour nous
condamner, c'est pour nous sauver, pour nous
éviter d'errer loin de lui. Il ne nous a pas
donné sa loi pour nous perdre, mais afin
que, reconnaissant notre perdition et notre
ignorance, nous recourrions humblement à sa
grâce et acceptions son salut et sa
révélation. Nous devons donc recevoir
son commandement avec joie, comme une
lumière sur notre chemin, comme une bonne
nouvelle, comme une parole de vie et d'amour. Et
nous devons aussi obéir joyeusement au
commandement, non par crainte, mais par
reconnaissance !
Sachant cela et connaissant l'amour de
Dieu pour nous, nous sommes maintenant responsables
devant lui et nous ne pouvons impunément
mépriser sa Parole, car le Seigneur, ton
Dieu est un Dieu jaloux ! Pour nous, la jalousie
est un vilain défaut, signe
d'infériorité et de faiblesse. Pour
Dieu, elle est l'expression de sa
souveraineté absolue. Dieu, il est vrai,
pour ce qui le concerne n'a à être
jaloux de personne, car personne ne peut contester
ni entrer en concurrence avec lui. Le
Créateur du ciel et de la terre est le
maître de tout ce qui existe. Mais il entend
être reconnu et adoré comme tel. Non
qu'il ait besoin de notre hommage, mais il ne peut
souffrir, pour nous, que nous détournions
sur des images taillées ou de vaines
représentations de la divinité,
l'hommage et la gloire qui reviennent à lui
seul. Il sait que c'est pour nous une question
de vérité, de vie
ou de mort. Il lui en coûte de nous voir
vivre dans l'erreur et dans le mensonge. Il est
jaloux pour nous, pour ses créatures, par
amour pour nous, car il nous veut rendre
participants de sa gloire, il nous veut tout
à lui, il ne peut souffrir de nous voir
partagés.
Enfin, il est un Dieu juste et
miséricordieux, dont la justice n'est pas
selon notre justice ni la miséricorde selon
notre miséricorde. Qui de nous ne s'est
heurté à ce passage du
deuxième commandement où il est dit
que Dieu punit l'iniquité des pères
sur les enfants; qui n'a estimé que cela
était contraire à la justice de Dieu
? (Il faudrait aussi nous étonner qu'il
fasse miséricorde jusqu'en mille
générations, mais cela nous parait
tout naturel, alors que c'est justement
surnaturel). Il n'est possible, dans le cadre de
cette étude, que d'essayer d'orienter la
compréhension de ce passage. Au chapitre
cinq de l'épître aux Romains,
l'apôtre Paul déclare notamment:
« Comme par un seul homme le
péché est entré dans le monde,
et par le péché, la mort, et qu'ainsi
la mort s'est étendue sur tous les hommes,
parce que tous ont péché... à
plus forte raison la grâce de Dieu et le don
de la grâce venant d'un seul homme,
Jésus-Christ, ont-ils été
abondamment répandus sur beaucoup ». La
nature humaine telle que nous l'héritons en
naissant, n'est pas bonne ni obéissante
à Dieu, mais elle est sous la domination du
péché et de la mort, rebelle à
l'égard de Dieu, sous le signe de la
colère et de la malédiction. Les
enfants portent la faute de leurs pères, et
la créature déchue ne peut que subir
la dure loi de la nécessité. Mais
là où le péché a
abondé, la grâce a surabondé,
là où la punition s'étendait
jusqu'à trois ou quatre
générations, la miséricorde
s'étend jusqu'à
mille générations ; là
où régnait l'ordre de la
fatalité, triomphe maintenant l'ordre de la
grâce. Si quelqu'un est en Christ, il n'est
plus soumis à l'ordre naturel et implacable
du péché et de la mort, mais il est
une nouvelle créature. une créature
pardonnée, c'est-à-dire
libérée de son passé, de la
loi nécessaire de causalité,
affranchie des choses vieilles, ressuscitée
! Toutes choses sont devenues nouvelles, et la
miséricorde de Dieu est offerte à
tous largement, offerte aussi aux enfants de ceux
qui le haïssent et qui se repentent, qui
aiment Dieu et qui gardent ses
commandements.
Et maintenant, mais maintenant
seulement, nous pouvons écouter le
deuxième commandement : parce que je suis
l'Éternel ton Dieu, le Dieu vivant, tu ne te
feras pas d'image taillée; parce que je suis
un Dieu jaloux, aux exigences absolues, tu ne vas
pas rendre à des idoles le culte qui n'est
dû qu'à Dieu; parce que c'est moi qui
te révèle qui je suis, tu n'iras pas
chercher de révélation en dehors de
moi, dans ton intelligence, dans ton coeur, dans ta
conscience ou dans la nature. Tu n'iras pas
chercher la vérité ailleurs que dans
ma Parole.
Voyons maintenant le commandement
proprement dit.
Et d'abord à qui s'adresse-t-il ?
Aux Juifs adorateurs du veau d'or, séduits
par les dieux étrangers et dont la tentation
fut toujours de se représenter Dieu sous une
forme matérielle ? Aux Juifs, certes. Aux
païens, adorateurs d'idoles ? Certes. Aux
catholiques dont les églises sont pleines
d'images [aillées ? Certes. À nous
peut-être, qui pourtant sommes les fils
spirituels de ces Réformateurs dont l'effort
a été de rétablir le culte en
esprit et en vérité
? À nous aussi, certes. Et si vous le voulez
bien, c'est de nous seulement que nous nous
occuperons.
Que nous ayons d'autres dieux devant la
face de l'Éternel et que nous transgressions
par là le premier commandement, cela n'est
que trop évident et certain. Je n'ai pas
à y revenir ici. Que nous nous fassions de
fausses représentations de Dieu, cela est
moins évident mais tout aussi certain. Il
est vrai que nous, protestants
réformés, nous n'adorons pas, que
nous ne nous prosternons pas et que nous ne servons
pas d'images taillées, statues de pierre ou
de bois. On ne rencontre rien de tel dans nos
temples ni aux carrefours de nos cités.
Notre paganisme - si paganisme il y a - est moins
grossier, moins évident, plus raffiné
et plus spirituel. Le deuxième commandement
vise aussi ce paganisme-là.
Il nous est interdit de chercher
à nous représenter Dieu dans la
nature (le mot étant pris ici dans un sens
très général). Ni ce qui est
dans les cieux, ni ce qui est sur la terre ou dans
les eaux plus bas que la terre n'est l'image de
Dieu. Le plus beau paysage, le plus magnifique ciel
étoilé, toutes les merveilles de la
création, la beauté, la force ou la
race ne sauraient nous révéler le
vrai Dieu ou en être l'analogie. La
création est l'oeuvre de Dieu mais elle
n'est pas Dieu. L'homme lui-même,
créé pourtant à l'image de
Dieu, a terni et brouillé cette image dans
le péché; ni lui, ni son esprit, ni
ses oeuvres, ni même sa conscience ne
sauraient révéler Dieu. La
création tout entière ne peut
directement et en dehors de la foi nous servir
d'image pour nous faire connaître le
Créateur. Elle éloigne de Dieu bien
plus qu'elle n'en rapproche ceux qui
prétendent l'y trouver.
Les images taillées sont les
signes matériels et
révélateurs de cette fausse
représentation de Dieu dans la nature. Elles
sont le signe, la conséquence logique et
nécessaire d'une déformation de
l'esprit, d'une insubordination de la
créature vis-à-vis de son
Créateur, d'un paganisme profond, souvent
inconscient ou inavoué. Or, je crois que
chez nous ce paganisme des esprits est
déjà assez avancé et qu'il se
trahit même extérieurement, sous des
formes d'apparence, il est vrai, encore inoffensive
et charmante. Nous n'en sommes évidemment
pas à ériger des statues de la
divinité; nous éprouvons une sainte
indignation pour ceux qui se prosternent devant
l'ouvrage de leurs mains, mais cependant
déjà apparaissent et se multiplient
toutes sortes de manifestations idolâtres,
d'inspiration païenne. Je n'en veux pour
preuve que les fétiches, porte-bonheur ou
autres objets de superstition largement
répandus et en honneur chez nous. Expression
naïve et inoffensive qui n'a rien à
voir avec le veau d'or, les idoles ou
fétiches païens, ni même avec les
statues de la Vierge ou des saints ! ... Est-ce
bien sûr ? Les païens, pas plus que les
israélites, pas plus que les catholiques ne
sont assez sots pour croire que leurs idoles ou
leurs statues sont véritablement Dieu; il
est évident pour tous que Dieu n'est pas un
morceau de bois ou de pierre. Elles n'en sont que
la représentation, expression visible et
tangible d'une réalité invisible. Or
l'intérêt que l'on porte aujourd'hui
aux fétiches et porte-bonheur est exactement
du même ordre, d'ordre religieux plus que
simplement esthétique. Le petit objet que
l'on emporte jalousement avec soi est sensé
être le gage, la représentation
concrète et disponible d'une puissance
bienfaisante et favorable. « Allons !
fais-nous un dieu qui marche
devant nous ! » C'est toujours la même
histoire.
Voici un autre exemple sur lequel je ne
m'étendrai pas : les chefs d'États
totalitaires, comme du reste aussi le pape, ou
l'Église catholique ne sont-ils pas devenus,
pour le peuple, des représentants de Dieu
sur la terre, des images visibles du Dieu
invisible, - on n'ose tout de même pas dire
des sortes d' « ersatz », mais c'est bien
ce mot qui vient ici à l'esprit.
Tout cela - et mille autres exemples que
l'on pourrait évoquer encore - trahit,
disions-nous, une déformation de l'esprit
qui se fait une fausse représentation de
Dieu, selon la fantaisie ou les lumières de
l'imagination ou de la raison, selon aussi les
desseins diaboliques de Satan. Image que nous, les
hommes, nous nous faisons, qui naît de notre
cerveau, précisément de notre
imagination : Dieu des philosophes et des savants,
issu de nos spéculations, produit de notre
sagesse; ou bien : Dieu de la nature, né du
sentiment et de l'instinct; Dieu fait a notre
mesure, à notre image, que nous nous
permettons de juger, plutôt que d'accepter
d'être jugés par lui, dont nous nous
permettons d'estimer l'incommensurable sagesse;
Dieu fait de main d'homme ou de pensées
d'homme, caricature du vrai Dieu. De notre fameuse
et prétendue liberté de conscience
nous avons fait un dieu à notre image,
à la mesure de notre misérable
condition et au service de nos caprices; un «
bon Dieu », par exemple, dont l'indulgence et
la bonté excluraient la justice; ou bien
encore un Dieu démocratique ou patriotique,
le Dieu de nos pères ou le Dieu de nos
sécurités, etc. Tous nos «
pourquoi », nos révoltes ou notre
indifférence, tout notre paganisme
avoué ou non, tout cela vient de ce que nous
nous faisons un Dieu selon notre
représentation, selon notre désir. Il
suffit pour s'en rendre compte de
s'interroger loyalement. Si spiritualisée,
si idéalisée que soit notre «
conception » de Dieu, elle reste notre
conception, et rien ne nous assure qu'elle
corresponde à la
réalité.
Nous transgressons donc aussi, nous,
protestants, le second commandement.
Bien plus, nous ne le pouvons autrement,
car Dieu est au ciel et nous sommes sur la terre,
et nous ne pouvons nous représenter ce qui
est au ciel qu'au moyen d'images terrestres. Nous
sommes dès lors sous la malédiction
de la loi qui nous condamne et nous tue; mais
Christ nous a rachetés de la
malédiction de la loi
(Gal. 3/13.). Ce que nous ne pouvions
accomplir, il l'a accompli pour nous, à
notre place, il a accompli la justice de la loi
afin que nous ne soyions plus sous la
condamnation.
Écoutez la bonne nouvelle
:
Dieu a eu pitié de nous, de nos
tâtonnements, de nos vaines recherches, de
nos pauvres idoles., de nos imparfaites et
mensongères images; il est venu
lui-même nous donner son image, nous dire
comment il veut, lui, que nous nous le figurions;
il s'est donné à connaître en
une forme qui nous fût accessible, qui
fût terrestre Pour nous, créatures non
pas spirituelles mais de chair, il s'est fait
chair, il est venu habiter parmi nous, il s'est
révélé c'est-à-dire
fait connaître, en
Jésus-Christ.
Toutes les images et les
représentations de Dieu, quelquefois bien
sympathiques, bien attachantes et
séduisantes, que nous tenons à notre
disposition et dans lesquelles nous nous
complaisons, doivent maintenant faire place
à cette image, choisie et envoyée par
Dieu pour se faire connaître, image qui ne
sera jamais la nôtre mais
qui reste à la disposition de Dieu. Elle ne
nous plaît pas peut-être et nous
eussions souhaité qu'elle fût
différente. Les uns voudraient supprimer le
scandale de la croix, les autres faire du Christ un
héros, un idéaliste, un philanthrope,
un rêveur ou encore un aryen. Mais qu'importe
tout ce que nous voudrions, à
côté de ce que Dieu a voulu. Nous
sommes placés devant un fait, devant le fait
de la révélation unique de Dieu en
Jésus-Christ; nous n'avons pas à
discuter ce fait mais à l'accepter ou
à le rejeter. Et c'est à partir de
lui que nous devons comprendre la
révélation de Dieu dans l'Ancien
Testament, c'est en Christ que Dieu est notre Dieu,
qu'il est juste et miséricordieux.
« Christ est l'image du Dieu
invisible »
(Col. 1/15). Il est le chemin, la
vérité et la vie. Pour aller à
Dieu, pour connaître Dieu, pour comprendre
Dieu, il faut passer par lui, par ce chemin; et
nous savons que ce chemin passe par la croix. C'est
par elle que Dieu nous juge, qu'il nous aime et
qu'il nous sauve. Oui, qu'il nous sauve de tous nos
faux dieux, de toutes nos idoles et de toutes nos
folles imaginations. Christ est l'Image, la Parole,
la Sagesse du Dieu invisible. Si nous
prétendons connaître Dieu en dehors de
lui, c'est que notre orgueil nous aveugle et nous
perd, et que nous méprisons la
révélation de Dieu. La loi, dit Saint
Paul, a été un pédagogue pour
nous conduire à Christ
(Gal. 3/24). En dehors de lui elle
nous condamne, en lui elle nous maintient dans sa
communion; en dehors de lui elle nous livre
à la colère de Dieu, en lui elle nous
révèle son amour et sa
miséricorde.
Comment dès lors obéir au
deuxième commandement? La réponse
à cette question était
déjà implicitement contenue dans tout
ce que nous avons dit jusqu'ici. Obéir au
deuxième commandement c'est accepter de ne
pas te faire, toi, selon ton idée ou ton
goût, d'image et de représentation de
Dieu; c'est accepter que Dieu le fasse pour toi,
c'est accepter la révélation de Dieu
lui-même par lui-même.
C'est-à-dire qu'obéir au
deuxième commandement (comme à tous
les autres du reste) c'est accepter la grâce
qui t'est faite en Jésus-Christ,
gratuitement; c'est croire « qu'en lui habite
corporellement toute la plénitude de la
divinité », c'est croire que nous avons
« tout pleinement en lui qui est le chef de
toute domination et de toute autorité »
( Col. 2/9 et 10)
Et c'est là l'oeuvre du
Saint-Esprit.
Accepter le Christ, c'est accepter, sans
y rien ajouter ni rien y retrancher, le
témoignage que rendent de lui les Saintes
Écritures de l'Ancien et du Nouveau
Testament, c'est écouter la
prédication de la Parole de Dieu et ne point
mépriser les signes visibles par lesquels il
nous atteste la réalité des promesses
spirituelles, le baptême et la Sainte
Cène, signes, ceux-là, non seulement
permis mais nécessaires, que Dieu a
institués, par égard à notre
faiblesse, pour nous représenter les choses
spirituelles et célestes.
Nous voyons donc que Dieu a pourvu
à tout et qu'en nous donnant son
commandement il nous a donné en même
temps les moyens de lui obéir, de vivre non
plus sous la condamnation de la loi, mais dans la
libération de la grâce, car «
Christ est la fin de la loi pour tous
ceux qui croient »
(Rom. 10/4). En lui le commandement
n'est plus un impératif catégorique :
tu ne dois pas te faire d'images taillées,
mais il devient une promesse de grâce: tu ne
te feras plus d'images taillées ni de
ressemblance quelconque de Dieu, car tu n'en auras
plus besoin, tu n'en auras même plus envie,
ayant tout pleinement en Christ, l'image du Dieu
invisible.
Jean-Ph. RAMSEYER.
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