Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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LA PALESTINE AU TEMPS DE JÉSUS-CHRIST


CHAPITRE VIII
LA VIE PRIVÉE

 LE MARIAGE

 



Les promesses de mariage. - Les fiançailles. - Les conditions. - La cérémonie des fiançailles. - Les noces. - Les cérémonies du mariage. - Il n'y avait point de service religieux.
La mort. - Les Juifs ensevelissaient les corps et ne les brûlaient pas. - Le cercueil - Les funérailles aujourd'hui chez les Arabes. - Le cortège funèbre au premier siècle. - Les tombeaux. - L'intérieur d'un sépulcre. - Le deuil. - Sa durée.


Jésus a souvent parlé du mariage dans ses paraboles (1) ; il. a assisté à des noces à Cana (2); il s'est comparé lui-même à un époux (3); et les renseignements que les Talmuds nous ont conservés sur la manière dont les mariages se célébraient chez les Juifs confirment, d'une manière intéressante, l'exactitude des récits évangéliques.

La loi de Moïse n'avait laissé aucune direction pour les coutumes à observer, mais nous trouvons çà et là dans l'Ancien Testament et dans les Talmuds des détails précis qui nous permettent de reconstituer toutes les cérémonies en usage au premier siècle. Nous savons exactement ce qui se passait avant et pendant le mariage.

On distinguait trois phases :

1° la promesse,
2°, les fiançailles,
3° le mariage.

La promesse était un simple engagement qui n'avait rien de définitif. Il pouvait y en avoir un certain nombre de rompues avant les fiançailles proprement dites. Les jeunes gens et les jeunes filles se promettaient le mariage, puis ils se fréquentaient, apprenaient à mieux se connaître et décidaient s'ils voulaient en venir aux fiançailles véritables ou non. Nous avons un joli passage de la Mischna sur ces promesses passagères qui précédaient toujours l'engagement définitif : « R. Siméon, fils de Gamaliel, disait : il n'y avait point de fête en Israël comme celle du 15 d'Ab et de Kippour. Dans ces deux jours, les jeunes filles de Jérusalem, vêtues de blanc, en robes fraîchement lavées, mais qu'elles se prêtaient mutuellement afin de ne point faire honte à celles qui n'en avaient point en propre, sortaient pour aller danser dans les vignes. Et quels discours y tenaient-elles ? Jeune homme, vois donc et tâche de bien choisir; ne t'attache point à la beauté, mais consulte plutôt la famille ; car la grâce est mensongère et la beauté vaine :
C'est la femme qui craint Dieu qui sera louée (4) ». Parfois le père disposait de sa fille mineure sans son consentement ; ce qui n'avait pas grande importance puisque l'engagement pouvait être rompu. Si la jeune fille était majeure son consentement était nécessaire (5).

Les fiançailles venaient ensuite, c'était un acte de la plus grande importance, elles devaient durer une année entière et avaient un caractère aussi définitif que le mariage lui-même. La jeune fille fiancée qui manquait à sa promesse était lapidée comme la femme adultère. Toute une cérémonie avait lieu qui cimentait les engagements pris et leur donnait quelque chose d'absolu.

Chez les anciens Hébreux on se fiançait en se donnant mutuellement sa parole; on s'engageait de vive voix (6). A partir (le l'exil ou, en tout cas, à l'époque de la Mischna on prit l'habitude des contrats écrits et signés (7). mais l'usage de considérer les deux jeunes gens comme liés par les fiançailles était très ancien (8). Avant la cérémonie, on réglait les conditions auxquelles se ferait le mariage. C'étaient quelquefois les, frères aînés qui négociaient avec le père de la jeune fille (9), laquelle du reste devait consentir aussi à tout ce qu'on déciderait (10).

La grosse question n'était pas de savoir si les jeunes gens se connaissaient, car souvent ils ne s'étaient jamais vus (11) et rien n'était rare comme les mariages d'inclination (12). Il s'agissait purement et simplement de fixer ce que le jeune homme donnerait pour avoir sa femme, c'est-à-dire à quel prix il l'achèterait, car ces mariages, où ce n'était pas le père qui dotait sa fille mais le fiancé qui apportait de l'argent, se trouvaient être de véritables ventes. Les parents et amis réglaient entre eux la somme à laquelle on estimait la jeune fille, et les cadeaux qu'elle devait recevoir. Le total s'appelait Mohar. Aujourd'hui encore, chez les Arabes, le mariage est une vente. Le Mohar n'était point fixe.

Le père de la jeune fille en indiquait le montant et c'était au jeune homme à l'accepter ou à le refuser. S'il acceptait, il s'acquittait de sa dette soit en argent soit en nature. Parfois il se mettait au service de son futur beau-père et la durée de ce service était celle des fiançailles (13).

La cérémonie des fiançailles se faisait ainsi : les deux familles se réunissaient avec quelques témoins étrangers (14) et le fiancé remettait à la fiancée, ou a son père, si elle était mineure, soit un anneau d'or (15), soit un objet de prix, soit enfin un simple écrit par lequel il s'engageait à l'épouser; puis il lui disait : « Voici, par cet anneau (ou cet objet) tu m'es consacrée, selon la loi de Moïse et d'Israël (16) ».
Ensuite on laissait passer au moins une année; mais l'anneau était donné, et le divorce ou la mort pouvaient seuls séparer les futurs époux (17).

Les Talmuds donnent un singulier motif à cette longue durée des fiançailles : il fallait laisser à la jeune fille « le temps de faire son trousseau (18) ».

Si la fiancée était veuve on réduisait le temps où elle devait attendre à un mois au minimum. Du reste le fiancé était dispensé du service militaire et depuis le jour de la promesse définitive jusqu'à un an après le mariage, les jeunes gens n'étaient point tenus d'assister à des enterrements et d'entrer dans les cimetières. « La joie seule doit remplir leur coeur. » Il va sans dire qu'un festin de réjouissances terminait la journée (19).

A l'époque de la Mischna l'usage pour le père de doter sa fille a commencé à s'établir. Les Talmuds en firent plus tard une obligation (20) et le minimum en fut fixé à cinquante zouz (21), (mais le don du mari restait toujours le plus élevé, il était au minimum de deux cents zouz (22).

Les fiançailles finies, on célébrait les noces. Le jeune homme devait avoir au moins dix-huit ans (23) et la jeune fille douze. Elles se faisaient le quatrième jour de la semaine; le cinquième si la fiancée était veuve (24).

Les noces de Cana ont donc été célébrées un mercredi ou un jeudi. La cérémonie avait toujours lieu le soir (25) au coucher du soleil. Le moment le plus solennel, celui qui marquait l'accomplissement du mariage était celui où la fiancée entrait dans la maison de son fiancé, sa nouvelle demeure. Aussi appelait-on le mariage : « réception » ou « introduction de l'épouse » (dans la maison de l'époux). Les parents de la jeune fille venaient la prendre chez son père pour la conduire chez son mari. Parfois le fiancé venait la chercher lui-même comme dans la parabole des dix vierges (26). Ses parents lui donnaient leur bénédiction (27). Elle sortait de chez son père parfumée, parée, avec une couronne sur la tête (28). Elle était entourée de ses amies qui lui faisaient cortège et agitaient au-dessus de sa tête de longues branches de myrte. Chacune de ces jeunes filles avait une lampe, qu'elle avait apportée. Cette lampe était formée d'un bâton de bois, terminé par un petit vase ou une sorte de plateau dans lequel il y avait une mèche avec de l'huile et de la poix.
L'Evangile parle de « dix vierges ; » il y en avait parfois bien davantage. mais rarement moins.

L'épouse pendant le trajet avait les cheveux flottants et le visage caché sous un voile. Devant elle ses parents distribuaient aux enfants des épis grillés. La joie éclatait de toutes parts sur son passage. Si l'époux était venu la chercher, il s'était paré lui aussi et portait une couronne. Tous deux marchaient ensemble sous un dais ; dans le cortège on jouait du tambour ou d'autres instruments; plusieurs portaient des flambeaux et des torches. D'autres chantaient et dansaient (29).

La joie ou la tristesse se manifestent toujours en Orient par de bruyantes démonstrations. Cependant, on arrivait à la maison de l'époux ; des matrones coiffaient l'épouse et lui cachaient ses cheveux épars sous un voile épais ; désormais elle n'aura plus jamais la fête découverte en public. On la reconduisait ensuite sous le dais soit dans la maison soit en plein air suivant la saison. Elle s'y plaçait à côté de son mari et tous deux entendaient de nouvelles paroles de bénédiction prononcées soit par un des deux pères, soit par un assistant notable. Enfin venait le repas de noces (30). On fournissait à chaque convive un « habit de noces » à son entrée dans la salle (31). Le repas était dirige par un personnage que l'Évangile de saint Jean appelle dans le récit des noces de Cana c'était celui qui disait les actions de grâces et prononçait les formules de bénédiction tout le temps que durait la fête. Entre autres, il bénissait le vin. Pendant le festin la gaîté et l'animation étaient de commande. De même qu'aux enterrements on avait des pleureurs et des pleureuses payées, Ide même à un mariage on montrait par politesse une joie quelquefois forcée. Il était de bon ton de vanter la fiancée on lui attribuait sans scrupule des mérites qu'elle n'avait pas « agréable, belle et gracieuse fiancée », disait-on de toutes parts (32).

Les hommes les plus graves dansaient devant le marié pour lui faire fête. « Lorsque Mar, fils de Rabbena, fit les noces de son fils, il y invita des rabbins, et comme ils étaient trop gais, il fit apporter un vase valant quatre cents zouz et le brisa pour qu'ils fussent attristés (33). » Singulière manière d'arrêter la joie de ses convives et de les empêcher de commettre des excès !

Le lecteur aura remarqué qu'il n'y avait aucune cérémonie religieuse au mariage. La bénédiction des parents et des assistants était seule donnée aux nouveaux époux (34). Les Talmuds réprouvent énergiquement les unions libres (35), mais Moïse n'avait institué aucun rite ni laissé aucun ordre sur la manière dont on devait célébrer les mariages.

Après le festin, le mari était conduit par ses amis ( « les amis de l'époux » ou «les fils de l'époux ») dans la chambre nuptiale où sa femme l'avait précédé.

Les fêtes de la noce duraient sept jours pour les parents et les amis des nouveaux mariés (36), sept jours de réjouissances (37) appelés les « sept jours du repas de noces » ; mais le nombre complet de ce qu'on appelait les jours de noces était de trente (38).


Table des matières

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LA VIE PRIVÉE (La mort et les funérailles)

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1 Ev. de Matth., XXV, 1 et suiv. ; XXII, 2 et suiv.; Luc, XII, 36.
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2 Ev. de Jean, II, 1 et suiv.
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3 Ev. de Matth., IX, 15 et parall.
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4 Mischna Taanith. IV, 5. Proverbes, XXXI, 30 et suiv.
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5 Kidduschin, 41 a. Nous ne savons à quel âge l'homme et la femme étaient majeurs. Il est souvent question dans les Talmuds de majorité et de minorité, mais nous n'avons trouvé nulle part d'indication précise de l'âge où la minorité finissait.
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6 Ezéchiel, XVI, 8. Malachie, II, 14.
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7 Cet écrit stipulant les promesses du mari à sa femme s'appelait Ketoubah.
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8 Deutéronome, XXII, 23.
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9 Genèse, XXXIV, 11.
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10 Genèse, XXIV, 57.
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11 Genèse, XXIV, 3, 4; XXXVIII, 6.
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12 Le mariage de Samson est une exception presque unique; Juges, XIV, 2. il en est de même du mariage de Jacob avec Rachel; Genèse, XXIX, 18.
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13 Genèse, XXIX, 18, 27; XXXIV, 12. Voir aussi 1 Samuel, XVIII 25-27 ; Osée, III. 2: Josué, XV, 16. 17.
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14 Kidduschin, 65 a.
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15 Kidduschin, Il 1.
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16 Kidduschin, 5 b. Cette cérémonie se fait encore chez les Israélites modernes, mais seulement au mariage.
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17 Kidduschin, Il 1.
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18 Mischna, Ketouboth 5, 2 ; et Jérus., Ketouboth, 57 b. Ce motif ne paraîtra peut-être plus aussi singulier quand ou saura qu'aujourd'hui encore, en pays basque et ailleurs, il est invoqué pour justifier les longues fiançailles.
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19 Genèse, XXIV, 54 ; XXIX, 22.
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20 Ketouboth, 52, a.
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21 Mischna, Ketouboth, VI, 6. Le zouz valait à peu près quatre-vingt-dix centimes.
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22 S'il y avait eu séduction, le séducteur devait épouser la jeune fille et payer sa dot. Exode, XXII. 16.
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23 Pirké Aboth, V, 21.
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24 Ketouboth, I, 1.
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25 Mischna, Ketouboth, II, 1 et Talm., id. 17, a et b.
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26 Ev.de Matth., XXV, 1 et suiv. Voir aussi Esaïe, LXI, 10; Cant III, 11.
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27 Genèse, XXIV, 60.
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28 Ezéchiel, XVI, 9. 13. Voir aussi Esaïe, LXI, 10, Jérémie, II, 32.
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29 Jérémie, VII, 34. 1 Macch., IX, 37, 39. Matth., XXV, 1 et suiv.
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30 Juges, XIV, 10. Jean, Il, 9, 10.
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31 Ev. de Matth., XXII, 12.
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32 Ketouboth, 17 a et b.
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33 Bab., Berakoth, fol. 31, 1.
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34 Ruth IV, Il. Tobie, VIl, 15
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35 Kidouschin, 12, b.
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36 Ev. de Matth., IX, 15.
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37 Genèse, XXIX, 27. Juges, XIV, 10.
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38 Joma, ch. I, 1. Le mariage se célébrait, parait-il avec plus de décorum en Galilée qu'en Judée (Tosiftah. ch. I).

 

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