ARGUMENS ET
RÉFLEXIONS SUR LES LIVRES ET LES CHAPITRES
DU NOUVEAU TESTAMENT
ÉVANGILE
SELON SAINT MARC.
CHAPITRE VI.
1-29.-
Il est ici parlé
- 1. De l'arrivée de
Jésus-Christ à Nazareth et de
l'incrédulité des habitans de
cette ville ;
- 2. de l'envoi des apôtres dans la
Judée;
- 3. de la mort de Jean-Baptiste.
- I. 1-6; Il. 7-13; III. 14-29.
RÉFLEXIONS.
VOICI les réflexions qu'il
faut faire sur les trois parties de cette lecture.
La première regarde
l'incrédulité et l'ingratitude de
ceux de Nazareth qui ayant le bonheur d'avoir
Jésus-Christ parmi eux, ne reconnurent pas
que la sagesse et la puissance qui étaient
en lui venaient de Dieu, et profitèrent si
mal de sa présence; ce qui fut cause qu'il
ne fit que peu de miracles dans ce lieu-là.
Voilà comment les préjugés et
la malice des hommes font qu'ils négligent
les plus grands avantages dans le temps qu'ils leur
sont offerts; cela montre aussi que si Dieu les
prive de sa grâce, c'est parce qu'ils la
méconnaissent et qu'ils y mettent
eux-mêmes des obstacles.
Sur l'envoi des apôtres, il
faut remarquer,
1. que Jésus-Christ, par un
effet de sa sagesse et de sa bonté envers
les Juifs, envoya les apôtres pour annoncer
la venue du règne de Dieu dans la
Judée, et qu'afin de rendre leur
prédication plus efficace, il leur donna le
pouvoir de faire des miracles.
2. Il leur défendit de
prendre des provisions pour ce voyage, parce qu'il
devait être court, et pour leur apprendre de
bonne heure à se confier en
la providence.
3. Il déclara que ceux qui ne
voudraient pas les recevoir seraient punis
très-rigoureusement, en quoi l'on voit la
condamnation de ceux à qui Dieu fait
présenter le salut et qui rejettent les
offres de sa grâce.
Pour ce qui est de la mort de
Jean-Baptiste, elle doit être
attribuée à la haine dont
Hérodias était aminée contre
lui, parce qu'il condamnait son mariage avec
Hérode, et à la lâche
complaisance d'Hérode, qui sacrifia à
cette femme impudique Jean-Baptiste, pour lequel il
avait d'ailleurs de la vénération, et
qu'il regardait comme un homme juste et saint.
On voit ici que les personnes
vicieuses haïssent d'ordinaire ceux qui les
reprennent de leur vie
déréglée, que
l'impureté aussi bien que la complaisance
que l'on a pour les méchans ont toujours des
suites funestes, et qu'il est dangereux de se lier
par des sermens téméraires. Il est
cependant à remarquer que Dieu permit que
Jean-Baptiste perdit ainsi la vie, afin de
préparer les Juifs à ce qui devait
arriver à Jésus-Christ
lui-même, dont ce saint prophète avait
été le précurseur
C'est enfin une chose digne
d'attention qu'Hérode, qui était dans
les sentimens des sadducéens, lesquels ne
croyaient pas la résurrection, crût
que Jean-Baptiste, qu'il avait fait
décapiter, était revenu en vie. Cela
fait voir que les impies et les incrédules
n'ont aucune croyance fixe et arrêtée.
Une conscience coupable est toujours en crainte; et
dans les remords dont les méchans sont
agités, ils admettent les
vérités qu'ils rejetaient auparavant
et ils se persuadent des choses qui sont contraires
aux sentimens dont ils font profession.
CHAPITRE VI.
30-56.-
Notre-Seigneur
- nourrit cinq mille personnes d'une
manière miraculeuse;
- ses disciples étant exposés
à une tempête, il va vers eux en
marchant sur la mer;
- et étant arrivé au pays de
Génésareth, il y guérit
plusieurs malades.
- I. 30-44; II. 45-52; III. 53-56.
RÉFLEXIONS.
Nous devons ici faire attention, en
premier lieu, à la bonté de Notre
Seigneur qui, voyant les besoins du peuple qui le
suivait, fut ému de compassion envers eux et
leur donna avec la nourriture de
l'âme celle du corps, en multipliant les
pains d'une manière miraculeuse. Il y a une
circonstance particulière dans ce miracle,
et qui le distingue des autres. C'est qu'il le fit
en faveur d'un grand peuple, au lieu qu'il ne
faisait les autres qu'en faveur de certaines
personnes en particulier, ce qui devait rendre ce
miracle plus fameux et plus éclatant.
Notre Seigneur fit voir ensuite
cette même bonté, aussi bien que sa
puissance et sa sagesse, lorsque ses disciples
étant en danger de périr dans une
tempête, il alla vers eux en marchant sur la
mer, et qu'il fit cesser l'orage. Il paraît
qu'il était nécessaire que le
Seigneur fit ce nouveau miracle, pour convaincre
pleinement ses disciples de sa puissance, puisque,
comme l'évangéliste le remarque, ils
n'avaient pas fait assez d'attention aux miracles
qu'ils lui avaient vu faire auparavant. C'est ainsi
que Jésus-Christ voulait confirmer leur foi,
qui était encore faible, et les persuader de
plus en plus qu'il était le Fils de Dieu.
Ce qui arriva dans cette occasion
doit aussi produire en nous une pleine persuasion
de la puissance sans bornes de Jésus-Christ,
et du soin qu'il a des siens; il n'y a aucun
péril d'où il ne puisse les tirer, ni
aucune affliction dont il ne leur donne une
heureuse issue; et c'est même dans ces
occasions-là qu'il leur fait le mieux sentir
combien il les aime.
Enfin, quand nous lisons que l'on
apportait de toutes parts des malades à
Notre Seigneur et qu'ils étaient tous
guéris, même par le simple
attouchement de ses habits, nous devons penser que
s'il déployait ainsi sa puissance pour le
soulagement et la guérison de ceux qu'on lui
présentait, il n'est pas moins
disposé à sauver tous ceux qui
cherchent auprès de lui la délivrance
des maux de l'âme; et c'est ce qui doit nous
inciter à nous adresser avec confiance
à ce Rédempteur charitable, pour
être aidés dans tous nos besoins.
CHAPITRE
VII.-
Ce chapitre a deux parties:
- 1. Les pharisiens se plaignant de ce que les
disciples de Jésus-Christ ne se lavaient
pas selon la continue des Juifs, il leur
reproche qu'ils violaient eux-mêmes les
commandemens de Dieu en enseignant que si un
enfant avait consacré, à Dieu le
bien dont il aurait pu assister son père
ou sa mère, il était obligé
d'accomplir ce voeu à la rigueur, et
qu'il ne lui était plus permis de
secourir son père et sa mère dans
leur nécessité
avec ce bien-là.
Notre Seigneur enseigne ensuite
au peuple et à ses disciples ce que c'est
qui souille l'homme, et ce que c'est qui ne le
souille pas.
Après cela il va du
côté de Tyr et de Sydon, où
il guérit la fille d'une femme
cananéenne ; et revenant dans la
Galilée, il guérit un homme sourd
et muet.
- I. 1-23; Il. 24-37.
RÉFLEXIONS.
Nous devons apprendre ici
:
1. que c'est hypocrisie de pratiquer
scrupuleusement des coutumes établies par
les hommes et de violer les lois divines et les
devoirs que Dieu a le plus expressément
prescrits, et que le vrai service de Dieu consiste
à garder ses commandemens; mais qu'il a en
abomination le culte des hypocrites, qui
prétendent l'honorer de la bouche ou par des
pratiques extérieures, pendant que leur
coeur est souillé et éloigné
de lui.
2. Ce discours de
Jésus-Christ nous enseigne que Dieu veut que
les enfans honorent et assistent leurs pères
et leurs mères, et que rien ne peut les
dispenser de ce devoir;
3. que les sermens et les voeux, par
lesquels on s'engage à faire des choses
contraires à la loi de Dieu, ne lient point
la conscience, et que ce serait pécher que
de les accomplir;
4. que ce qui nous souille devant
Dieu, c'est proprement ce qui vient du coeur; les
mauvaises pensées, les désirs impurs
et injustes, la haine du prochain, l'envie,
l'orgueil, la fierté, et les autres passions
de cette nature; que ces mauvaises pensées
sont de vrais péchés, et que c'est la
source de toutes les mauvaises actions que les
hommes commettent.
Lorsque Jésus-Christ donnait
ces instructions, il disait au peuple:
Écoutez tous ceci et comprenez-le bien. Cet
avertissement marque l'importance de cette doctrine
et nous oblige à éviter sur toutes
choses ce qui souille l'âme, et à
tâcher d'acquérir la véritable
pureté qui est celle du coeur.
Sur la seconde partie de ce
chapitre, il faut remarquer que Notre Seigneur
étant prié par une femme payenne de
guérir sa fille, il refusa de le faire,
alléguant qu'il n'était pas juste de
donner aux chiens le pain des enfans ; ce qui
voulait dire qu'il n'était pas raisonnable
que Jésus-Christ fit en faveur des payens,
qui étaient des étrangers, les
miracles qu'il refusait en faveur des Juifs qui
étaient le peuple de Dieu, et comme les
enfans de sa maison. Notre Seigneur disait cela,
parce que les payens ne devaient pas encore alors
être égalés aux Juifs. Mais
cette femme obtint enfin de lui,
par sa profonde humilité, par sa
persévérance, par sa foi, et par
l'ardeur de son zèle, la grâce qu'elle
venait lui demander.
On peut voir dans cette histoire,
que les payens n'étaient pas exclus de la
grâce de Dieu, et qu'ils devaient
bientôt y être admis aussi bien que les
Juifs. On y voit aussi que des prières
accompagnées d'humilité et de
zèle ont une grande efficace, et que si Dieu
ne nous accorde pas incontinent ce que nous lui
demandons, il en use ainsi pour exciter notre
ardeur et pour nous donner un sentiment plus vif de
notre indignité, mais qu'enfin on obtient
tout de lui par la persévérance.
Au reste, on doit admirer, dans ce
miracle et dans la guérison de cet homme
à qui Jésus-Christ rendit l'ouïe
et la parole, la facilité et la souveraine
puissance avec laquelle il guérissait toutes
sortes de maladies, et cette grande charité
qui le portait en toutes occasions à
secourir les malheureux et à faire du bien
à tout le monde.
CHAPITRE VIII.
1-21.-
Jésus-Christ
- nourrit miraculeusement quatre mille hommes.
- Il refuse de faire un signe que les
pharisiens lui demandaient,
- et il avertit ses disciples de se donner
garde du levain des pharisiens et du levain
d'Hérode.
- I. 1-9; II.10-13; III. 14-21.
RÉFLEXIONS.
ON doit premièrement admirer
ici la manière miraculeuse et pleine de
bonté dont Jésus-Christ nourrit
plusieurs milliers de personnes, avec sept pains et
quelques poissons, comme il avait
déjà fait peu auparavant. En faisant
ce miracle, il se proposait non-seulement de
pourvoir à la nourriture et aux besoins
corporels de ceux qui le suivaient, mais il voulait
les disposer à recevoir de lui la
véritable nourriture, savoir celle de
l'âme Au reste, la grande multitude de ceux
en faveur de qui Notre Seigneur multiplia ainsi les
pains et les poissons, et les pièces qui
demeurèrent de reste et dont les
apôtres emplirent sept corbeilles, sont deux
circonstances qui servirent à confirmer la
certitude de ce miracle et à le
répandre de tous côtés.
2. Les pharisiens demandèrent
à Jésus de leur faire voir un signe
du ciel, mais il ne voulut en
faire aucun. Il en usa ainsi très-justement,
parce qu'ayant déjà fait tant de
miracles dont ils n'avaient pas profité, ce
signe n'aurait servi de rien et ne les aurait point
touchés. Dieu, qui répond aux
désirs des âmes simples et
sincères, abandonne avec justice ceux qui
résistent à la vérité,
et après qu'il a mis en usage les moyens les
plus propres pour convaincre les hommes, il n'est
pas obligé d'en faire davantage; et il
emploierait même inutilement de nouveaux
moyens pour persuader des gens dont l'aveuglement
est volontaire et accompagné de malice.
3. Les apôtres ayant
oublié de prendre du pain avec eux, le
Seigneur les avertit de se garder du levain des
pharisiens et du levain d'Hérode, qui
était de la secte des sadducéens.
Cela voulait dire qu'ils devaient se donner garde
de la doctrine des pharisiens, qui étaient
des hypocrites et qui ne s'attachaient qu'aux
traditions et aux dehors de la religion, et des
sentimens impies des sadducéens qui niaient
la résurrection des morts, et qui avaient
encore d'autres erreurs pernicieuses. C'est ainsi
que ce divin Sauveur, par un effet de sa sagesse,
prenait ordinairement occasion des choses qui se
présentaient de donner à ses
disciples des instructions salutaires. Ce qu'il dit
dans cette rencontre nous apprend de quelle
importance il est de fuir toutes sortes de fausses
doctrines, et surtout de s'éloigner des
sentimens qui conduisent à la superstition
et à l'hypocrisie, ou à
l'impiété et à
l'incrédulité.
CHAPITRE VIII.
-22-38.-
Jésus-Christ
- 1. guérit un aveugle.
- 2. Il demande à ses disciples quelle
opinion le peuple avait de lui, et ce qu'ils en
croyaient eux-mêmes, et saint Pierre
reconnaît qu'il est le Fils de Dieu,
- 3. Notre-Seigneur prédit sa mort.
- 4. Il exhorte ses disciples à se
disposer à la souffrance et à
faire profession publique de l'Évangile
devant les hommes ; et pour les y engager, il
leur montre que c'est là l'unique moyen
d'éviter la perte de leur âme.
- I. 22-26; Il. 27-30; III. 31-33. IV. 34-38.
RÉFLEXIONS.
IL y a ceci de particulier dans la
guérison de l'aveugle dont il est
parlé dans ce chapitre, que Notre-Seigneur
ne le guérit pas tout d'un coup, mais qu' il
le fit successivement
Il en usa de la sorte pour
éprouver la foi de cet aveugle,
qui n'était
peut-être pas assez forte, pour lui faire
remarquer sa puissance d'une manière
sensible par le progrès de sa
guérison, et pour montrer, en ne faisant pas
toujours ses miracles de la même
manière, qu'il pouvait déployer la
puissance divine qui était en lui, ou tout
d'un coup, ou peu à peu et par
degrés, et qu'il était le
maître de faire ses miracles comme il le
trouvait à propos.
On voit ici, en second lieu, que
Jésus-Christ était regardé
parmi les Juifs comme un grand prophète,
mais que saint Pierre et les apôtres le
regardaient comme le Fils de Dieu; c'est aussi
là ce que nous devons tous croire du coeur
et confesser de la bouche, si nous voulons
être sauvés. Cependant le Seigneur
défendit à ses disciples de publier
qu'il fût le parce qu'il ne devait pas
prendre ouvertement cette qualité avant sa
mort.
3. Sur la prédiction que
Jésus-Christ fit de ses souffrances, il est
à remarquer qu'il en avertit ses disciples,
afin de les disposer peu à peu à cet
événement, auquel ils ne
s'attendaient pas et qui aurait été
capable d'ébranler leur foi. Ce fut pour les
persuader d'autant mieux de la
nécessité de cette mort, qu'il reprit
si fortement saint Pierre qui, étant dans
les préjugés des Juifs, ne pouvait
comprendre que celui qu'il venait de
reconnaître pour le Messie et le Fils de Dieu
dût mourir.
Mais ce que cet apôtre ne
comprenait pas alors est clair pour nous, qui
savons que cette mort est le moyen dont Dieu s'est
servi pour nous racheter.
Enfin Jésus-Christ nous
apprend dans ce chapitre, que ceux qui veulent
devenir ses disciples doivent renoncer à
eux-mêmes, et être prêts à
souffrir et même à perdre la vie pour
l'Évangile, s'ils y étaient
appelés; qu'il n'y a rien de plus important
que la perte ou le salut de notre âme, et que
nous devons faire une profession ouverte de la
piété et de la vérité,
si nous voulons que le Seigneur nous reconnaisse
pour ses vrais disciples, et qu'il nous
reçoive dans sa gloire lorsqu'il viendra
juger le monde. C'est ainsi que Jésus-Christ
instruisait les hommes des devoirs les plus
nécessaires de la religion, et qu'il leur
proposait les motifs les plus forts à s'en
acquitter.
CHAPITRE IX.
1-29.-
La première partie de ce
chapitre contient trois choses:
- 1. La transfiguration de
Jésus-Christ;
- 2. l'explication qu'il donna à ses
disciples de ce qui avait
été prédit, qu'Elie devait
venir au monde;
- 3. la guérison d'un lunatique que les
apôtres n'avaient pu guérir.
- I. 1-10; II. 11-13; III. 14-29.
RÉFLEXIONS.
NOTRE-SEIGNEUR fit voir sa gloire
à trois de ses apôtres dans sa
transfiguration, afin de les convaincre pleinement,
par cette apparition magnifique, qu'il était
le Fils de Dieu. Il le fit aussi, pour fortifier
leur foi, qui devait être
ébranlée par sa mort dans peu de
temps. Moïse et Elie parurent dans cette
occasion, pour faire voir que Jésus
était ce grand Rédempteur dont les
prophètes avaient parlé, et qu'il
était même au-dessus des
prophètes les plus illustres, entre lesquels
Moïse et Elie tenaient le premier rang. Outre
cela Dieu déclara alors, par une voix venue
du ciel, que Jésus-Christ était son
Fils bien-aimé, afin qu'il parla encore plus
clairement que c'était lui que tous les
hommes devaient désormais écouter et
à qui ils devaient obéir. Cette
transfiguration de Jésus-Christ est au reste
une image de la gloire dans laquelle il
paraîtra au dernier jour; et la
présence de Moïse et d'Elle prouve que
ces saints hommes vivaient après leur sortie
du monde, et qu'ainsi il y a une autre vie
après celle-ci pour les justes.
2. Notre Seigneur apprit à
ses disciples, dans cette occasion, que
Jean-Baptiste était cet Elie qui devait
venir, selon la prédiction de Malachie. Ce
nom avait été donné au
précurseur du Messie, parce que, comme le
prophète Elie, il devait réformer les
moeurs des hommes et rétablir le pur service
de Dieu. La manière honorable et
distinguée, dont Jésus-Christ parla
dans cette occasion de Jean-Baptiste, nous engage
à reconnaître la dignité de la
personne de ce grand prophète, à bien
considérer le but de son ministère,
et à nous soumettre à sa doctrine
aussi bien qu'à celle de
Jésus-Christ, qui est encore plus grand que
son précurseur.
3. On doit remarquer dans la
guérison du lunatique, que les apôtres
ne purent le délivrer, parce qu'ils
n'étaient pas assez persuadés qu'ils
pouvaient opérer ce grand miracle au nom de
Jésus-Christ; mais le Seigneur, ayant
égard à l'état
déplorable de ce jeune homme aussi bien
qu'à la foi et aux larmes de son
père, le guérit parfaitement, et par
sa seule parole. Ce que Jésus-Christ dit aux
apôtres dans cette occasion, nous montre que
c'était par la foi, par la prière et
par le jeûne qu'ils
pouvaient obtenir de Dieu le pouvoir de faire des
miracles. Ces moyens ne sont, ni moins efficaces,
ni moins nécessaires, pour résister
aux tentations et pour engager le Seigneur à
nous accorder les secours les plus puissans de sa
grâce; ainsi nous devons les pratiquer avec
soin.
CHAPITRE IX.
30-51.-
Notre Seigneur
1. avertit ses disciples que sa mort approchait.
- 2. Il les reprend sur ce qu'ils avaient
disputé entr'eux qui serait le plus
grand dans le royaume du Messie, et il leur
enseigne l'humilité en mettant un
petit enfant au milieu d'eux.
- 3. Il blâme saint Jean et ses
autres disciples de ce qu'ils sont
opposés à un homme qui chassait
les démons en son nom, et il les
avertit de ne scandaliser et de ne rejeter
aucun de ceux qui croyaient en lui.
- 4. Il les exhorte à éviter
tout ce qui pouvait être pour les
autres ou pour eux-mêmes une occasion
de scandale et de chute; il menace des peines
de l'enfer ceux qui n'évitent pas les
scandales; il leur représente
qu'étant comme le sel de la terre, ils
devaient travailler à édifier
tous les hommes, ce qu'ils feraient surtout,
en ne rebutant personne, en ayant pour tout
le monde des sentimens de charité, et
en vivant entr'eux dans l'union et dans la
paix.
- I. 30-31-32; II. 33-37; III. 38-42; IV.
43-51.
RÉFLEXIONS.
IL faut considérer ici que,
si les apôtres ne comprenaient pas ce que
Notre Seigneur leur disait de sa mort, cela venait
de ce qu'ils ne pouvaient concevoir que le Messie
dût mourir et souffrir un supplice
ignominieux et cruel.
2. La dispute qu'ils eurent, pour
savoir lequel d'entr'eux serait le plus grand dans
le royaume du Messie, venait aussi de l'opinion
où ils étaient que ce devait
être un royaume temporel et semblable
à ceux des rois de la terre.
Jésus-Christ les désabusa de ces
pensées, en mettant devant leurs yeux un
petit enfant, par où il voulait leur
inspirer des sentimens humbles, et leur apprendre
à ne point s'élever les uns
par-dessus les autres, et à ne
mépriser personne. Cette leçon est
pour tous les chrétiens; ainsi nous devons
bannir de nos coeurs toutes les pensées
d'orgueil et d'élévation, et
ressembler aux enfans, en douceur, en innocence et
en humilité.
3. Il est à remarquer que
Notre-Seigneur reprit ses disciples de ce
qu'ils avaient voulu
empêcher un homme qui ne les suivait pas de
chasser les démons au nom de
Jésus-Christ. Cette censure nous enseigne
bien clairement qu'il ne nous est jamais permis de
rejeter aucun de ceux qui font profession d'aimer
le Seigneur Jésus, mais qu'au contraire nous
devons les regarder tous comme nos frères,
les chérir et nous joindre à eux.
C'est ce que Jésus-Christ nous apprend
encore plus expressément, en disant que
c'est un des plus grands péchés de
mépriser ou de scandaliser aucun de ses
disciples, quand même il y aurait quelque
faiblesse en eux, ou qu'ils paraîtraient
méprisables selon le monde.
Enfin notre Sauveur nous exhorte
fortement, et sous les plus sévères
menaces, à résister à tout ce
qui peut être une occasion de chute, à
renoncer courageusement à ce qui nous serait
le plus cher, à mortifier nos inclinations,
et à souffrir même ce qu'il y a de
plus fâcheux, plutôt que de tomber ou
de faire tomber les autres dans le
péché, et que de s'exposer par
là à être jetés dans la
géhenne où le ver ne meurt point, et
où le feu ne s'éteint point.
CHAPITRE X.
1-31.-
Jésus-Christ fait trois
choses:
- 1. il répond aux pharisiens qui
l'avaient interrogé sur le divorce, et il
dit que la coutume qui était
établie parmi les Juifs, de
répudier les femmes pour toutes sortes de
raisons, était contraire à
l'institution du mariage.
- 2. Il bénit de petits enfans.
- 3. il répond à un jeune homme
riche qui lui avait demandé ce qu'il
fallait faire pour être sauvé, et
à cette occasion il dit que les richesses
empêcheraient plusieurs personnes de
croire en lui, mais qu'il récompenserait
abondamment ceux qui abandonneraient leurs biens
et tout ce qu'ils auraient de plus cher pour le
suivre.
- I. 1-12; Il. 13-16; III. 17-31.
RÉFLEXIONS.
Ce que Notre Seigneur dit aux
pharisiens, sur le mariage, nous apprend que Dieu
n'approuvait point les divorces tels que les Juifs
les pratiquaient, quoique ces divorces eussent
été tolérés
jusqu'alors, à cause de l'humeur charnelle
de ce peuple et de leur naturel porté
à la désobéissance.
Jésus-Christ dit expressément que ces
sortes de divorces ne devaient
plus avoir lieu parmi les
chrétiens, non plus que diverses autres
choses semblables que Dieu supportait autrefois;
que les lois du mariage sont inviolables, et
qu'elles lient aussi bien l'homme que la femme. Par
où nous voyons que le Fils de Dieu a
rétabli ces lois telles qu'elles
étaient au commencement du monde, et
qu'ainsi il n'est plus permis aux hommes ni aux
femmes de se séparer et de se remarier, si
ce n'est pour cause d'adultère.
La cérémonie de
l'imposition des mains que Jésus-Christ
pratiqua à l'égard des petits enfans,
et les prières qu'il fit pour eux, ne
permettent pas de douter qu'il n'aime les petits
enfans, et que ce ne soit une pratique conforme
à ses intentions de les offrir à Dieu
par le baptême et par la prière. Cela
nous montre aussi que le royaume des cieux n'est
que pour ceux qui, comme les petits enfans, sont
doux, innocens, et vides de l'amour du monde et de
sa gloire.
Nous devons apprendre, de
l'entretien que Jésus-Christ eut avec cet
homme riche dont il est ici parlé, que l'on
ne saurait entrer dans La vie éternelle si
l'on ne garde les commandemens de Dieu; mais qu'il
faut outre cela, en de certaines occasions,
abandonner ses biens et tout ce que l'on
possède en ce monde; qu'en
général les chrétiens ne
doivent pas s'attacher aux richesses, et que si
Dieu leur en donne, ils doivent les employer
à des usages de charité.
Nous recueillons de plus du discours
de Notre-Seigneur, que ce renoncement aux biens du
monde, quelque difficile qu'il paraisse d'abord,
n'est point un devoir impossible à
pratiquer, non plus que nos autres devoirs, et que
ceux qui auront ainsi renoncé aux biens de
la terre, comme les apôtres le firent
autrefois, en seront abondamment
récompensés en cette vie et en
l'autre. Au reste, l'exemple de cet homme qui avait
quelque chose de bon, et que Jésus-Christ
aima à cause de cela, mais qui fut
rebuté lorsque le Seigneur lui dit qu'il
devait se défaire de ses biens, prouve qu'il
se peut faire que des gens qui ont de bonnes
intentions et quelques bonnes dispositions ne
parviennent pas au salut. Cela leur arrive,
lorsqu'ils n'ont pas le courage de faire tout ce
qu'il faut pour l'obtenir et de renoncer à
certaines passions qui les dominent et qui y sont
un obstacle, et en particulier à l'amour des
richesses et à l'attachement pour les biens
du monde,
CHAPITRE X.
32-52.-
Notre Seigneur
- 1. avertit ses disciples de sa mort et de sa
résurrection.
- 2. Il répond à saint Jacques
et à saint Jean qui, croyant connue le
reste des Juifs que le Messie régnerait
glorieusement sur la terre, le priaient qu'ils
possédassent les premières
dignités dans son royaume
- 3. Il rend la vite à un aveugle
près de Jérico.
- I. 32-34; II. 35-45; III. 46-53.
RÉFLEXIONS.
ON doit considérer ici, en
premier lieu, que le temps de la mort de
Jésus-Christ approchant, il déclara
plus ouvertement aux apôtres qu'il serait
crucifié, et qu'il ressusciterait; mais ils
furent troublés; et effrayés à
l'ouïe de ce discours, parce qu'ils
s'attendaient à voir leur maître
régner glorieusement sur la terre. En cela
on découvre la sagesse et la bonté de
Jésus-Christ, qui voulait ainsi
préparer ses disciples à ce qui
devait lui arriver, et l'on y remarque aussi que
ses disciples étaient alors dans de grands
préjugés, et qu'ils ne savaient pas
encore ce que Notre Seigneur devait faire pour
sauver les hommes.
Il faut ensuite faire attention
à ce que Jésus-Christ dit à
saint Jacques et à saint Jean, qui
prétendaient occuper un rang
distingué dans son royaume. Il leur dit
qu'au lieu de s'attendre à être
élevés à des dignités,
ils devaient se préparer à boire la
même coupe, et à être
baptisés du même baptême que
lui, c'est-à-dire à passer par de
grandes souffrances, et même à endurer
la mort; et qu'ainsi ils devaient s'humilier et
être les serviteurs les uns des autres,
à l'exemple de leur maître, qui
n'était venu au monde que pour servir et
pour souffrir. Ces leçons et ce grand
exemple d'humilité regardent tous les
chrétiens, aussi bien que les apôtres,
et nous devons nous les proposer continuellement
afin de régler par là nos sentimens
et nos moeurs.
Enfin la guérison que
Notre-Seigneur accorda à cet aveugle qui
implorait son secours avec tant d'ardeur est une
nouvelle preuve de sa puissance et de sa grande
charité, et nous en devons conclure que,
s'il était si prompt à assister les
misérables, il sauvera encore plus
certainement tous ceux qui l'invoquent avec
humilité et qui cherchent auprès de
lui le salut et la vie.
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