ARGUMENS ET
RÉFLEXIONS SUR LES LIVRES ET LES CHAPITRES
DU NOUVEAU TESTAMENT
ÉVANGILE
SELON SAINT LUC.
CHAPITRE IX.
1-27.-
Saint Luc rapporte,
1. l'envoi des douze apôtres
dans la Judée, et les instructions que Notre
Seigneur leur donna;
2. l'opinion que le roi
Hérode avait de
Jésus-Christ;
3. le miracle de la multiplication
de cinq pains et de deux poissons;
4. l'entretien que Notre Seigneur
eut avec les apôtres, lorsqu'il leur demanda
quels sentimens ils avaient de lui; et ce qu'il
leur dit pour les avertir de sa mort, et pour les
préparer eux-mêmes aux souffrances.
I.1-6; Il. 7-9; III. 10-17; IV. 18-27.
RÉFLEXIONS.
CE qu'il y a à
considérer sur l'envoi des apôtres,
c'est que Jésus-Christ leur ordonna d'aller
devant lui dans la Judée, afin de
répandre partout la bonne nouvelle de la
venue du Messie, et de préparer les Juifs,
par leur prédication et par leurs miracles,
à le recevoir. Par là Il voulait
aussi les préparer eux-mêmes à
aller dans la suite annoncer l'Évangile par
toute la terre. Ce que l'on doit surtout remarquer
dans ce que Jésus-Christ leur dit, c'est que
le ministère des serviteurs de Dieu n'est
utile qu'à ceux qui les reçoivent, et
que ceux qui les rejettent attirent sur eux une
sévère mais juste condamnation. Il
paraît d'ici, en second lieu, que l'on avait
une haute opinion de Notre Seigneur parmi les
Juifs, puisqu'on croyait que c'était Elie,
ou quelqu'autre prophète; mais c'est une
chose très-remarquable, qu'Hérode,
qui était un prince
impie, et dans les sentimens des sadducéens
qui niaient la résurrection, croyait que
Jean-Baptiste, qu'il avait fait mourir,
était ressuscité.
On doit regarder cela comme un effet
des remords que ce prince ressentait d'avoir fait
mourir ce saint homme. Quoique les impies rejettent
les vérités de la religion, ils ne
sont jamais bien affermis dans leurs sentimens; et
lorsque leur conscience se réveille, ils
reconnaissent les mêmes vérités
qu'ils avaient révoquées en doute et
niées auparavant.
Le miracle que Jésus-Christ
fit en multipliant cinq pains et deux poissons,
pour donner à manger à plusieurs
milliers de personnes, est l'un des plus illustres
qu'il ait faits, puisque ces gens-là furent
autant de témoins qui allèrent
répandre partout le bruit de cette
merveille; ce qui servit à confirmer
puissamment la vérité de la doctrine
de Jésus-Christ et sa mission divine, et
à disposer un grand nombre de personnes
à croire en lui.
Ce que nous devons recueillir de
l'entretien que Notre Seigneur eut avec ses
disciples sur les sentimens qu'on avait de lui, et
sur ce qu'ils en pensaient eux-mêmes, c'est
que la foi en Jésus-Christ consiste à
le regarder comme le Messie et le Fils du Dieu
vivant; qu'il était venu au monde pour
souffrir et pour mourir; que personne ne peut
être chrétien, s'il n'a
premièrement appris à renoncer
à soi-même et à porter sa
croix, et si il n'est disposé à faire
toujours une profession publique de sa foi; et
enfin, que le salut ou la perte de l'âme est
la chose la plus importante de toutes, et que, bien
loin de nous mettre en danger de perdre notre
âme en voulant gagner le monde, il n'y a rien
que nous ne devions être prêts à
sacrifier pour la sauver.
CHAPITRE IX.
28-62.-
Notre Seigneur
est transfiguré en
présence de trois de ses apôtres.
Il guérit un lunatique que
ses disciples n'avaient pu guérir,
et il leur dit encore une fois qu'il
serait condamné à la mort.
Il leur enseigne l'humilité,
et il les blâme d'avoir empêché
un homme qui ne les suivait pas, de chasser les
démons en son nom;
il censure le zèle
inconsidéré de deux de ses
apôtres;
et il répond à trois
personnes qui voulaient le suivre.
I. 28-36; II. 37-42; III. 43-45; IV. 46-50; V.
51-56; VI. 57-62.
RÉFLEXIONS.
Nous avons, dans la transfiguration
de Notre Seigneur et dans
l'état de gloire où les apôtres
le virent alors, une preuve convaincante de La
vérité et de la divinité de
l'Évangile, comme saint Pierre, qui fut
présent à cette transfiguration, le
remarque dans sa IIe Épître au
chapitre I.
Moïse et Elie furent vus dans
cette occasion avec Jésus-Christ, et les
apôtres les entendirent s'entretenant avec
lui de ce qu'il devait souffrir à
Jérusalem, afin qu'il parût que
c'était de lui que les prophètes
avaient parlé. Dieu fit entendre une voix du
ciel, après que Moïse et Elie se furent
retirés, pour apprendre aux apôtres,
et par leur moyen à tous les hommes, que
désormais il ne fallait plus écouter
que Jésus seul, et qu'il était
infiniment plus grand que Moïse, qu'Elie, et
que tous les prophètes. Enfin il parait
d'ici que ces deux saints hommes, qui
n'étaient plus au monde depuis plusieurs
siècles, vivaient auprès de Dieu;
d'où nous devons conclure que ceux qui ont
servi Dieu fidèlement en cette vie, ne sont
pas détruits ni anéantis par la mort.
On voit dans l'histoire du lunatique
que la foi des apôtres était encore
bien faible, comme Notre Seigneur le leur reprocha;
mais cette foi se fortifia dans la suite, à
mesure qu'ils furent mieux instruits et que leurs
préjugés se dissipaient. Comme le peu
de foi des apôtres fut cause qu'ils ne purent
délivrer le lunatique, nos chutes et nos
manquemens ne viennent que du défaut de foi;
c'est pourquoi nous devons travailler à nous
y affermir, et prier le Seigneur qu'il l'augmente
de plus en plus en nous.
Les leçons d'humilité,
que Notre Seigneur donnait à ses disciples,
nous apprennent que les sentimens
d'élévation, et l'amour de la gloire
du monde sont indignes des chrétiens; qu'ils
doivent au contraire chercher leur gloire dans
l'humilité, et estimer tous ceux qui aiment
Jésus-Christ, quand même ils seraient
petits et méprisés dans le monde.
La réponse que
Jésus-Christ fit à saint Jean, qui
s'était opposé à un homme qui
chassait les démons au nom de
Jésus-Christ, parce que cet homme
n'était pas à l'ordinaire avec les
apôtres, nous enseigne qu'on ne doit jamais
s'opposer, sous quelque prétexte que ce
soit, à ceux qui travaillent
sincèrement à l'avancement du
règne de Notre Seigneur. Il faut faire cas
de la piété partout où elle se
trouve, puisque tout ce qui est bon ne peut venir
que de Dieu. Il y a d'importantes
considérations à faire sur la censure
que Jésus-Christ adressa à saint
Jacques et à saint Jean, lesquels,
emportés par un zèle indiscret et par
l'aversion que les Juifs avaient pour les
samaritains, voulaient faire
descendre le feu du ciel sur ces samaritains qui
n'avaient pas voulu loger leur maître. Cela
nous avertit de ne nous jamais laisser surprendre
par l'esprit de vengeance, ni par un zèle
faux et aveugle, tel qu'est toujours celui qui va
à faire du mal aux hommes; mais d'être
animés, comme Jésus-Christ l'a
été, d'un esprit de douceur et de
support envers tout le monde, et en particulier
envers ceux qui ont d'autres sentimens que nous sur
la religion.
Par les réponses que Notre
Seigneur donna à ces trois personnes qui
voulaient le suivre, il se proposait de leur faire
connaître,
1. qu'il ne promettait point les
commodités de cette vie à ses
disciples;
2. qu'il faut être prêt
à renoncer à tout pour l'amour de
lui, même aux choses qui sont innocentes et
légitimes, lorsqu'elles nous sont un
obstacle à faire notre devoir;
3. que quand on s'est une fois
engagé à son service, on doit suivre
sa vocation et ne plus regarder du
côté du monde.
CHAPITRE X.
1-24.-
Jésus-Christ choisit
soixante et dix disciples;
il les envoie devant lui; il leur
donne le pouvoir de faire des miracles, et les
instructions nécessaires pour leur emploi;
et il dénonce les jugemens de Dieu aux
villes où il avait prêché et
fait des miracles, et qui ne s'étaient pas
amendées.
Les soixante et dix disciples
rendent compte à Jésus-Christ du
succès de leur voyage et de leur
ministère et il prédit à cette
occasion la chute du règne de satan.
3. Il loue Dieu de ce que
l'Évangile était prêché
et reçu par des personnes qui
n'étaient pas distinguées ni
considérées dans le monde; et il
représente à ses disciples combien
ils étaient heureux d'être instruits
par lui des vérités de
l'Évangile.
I.1-16; Il. 17-20; III. 21-24.
RÉFLEXIONS.
JÉSUS-CHRIST, qui avait
déjà choisi douze apôtres,
voulut encore choisir soixante et dix disciples,
qu'il envoya dans la Judée, afin de
répandre plus promptement l'heureuse
nouvelle de la venue du règne de Dieu, et
afin qu'ils fussent dans la suite mieux en
état d'aller prêcher sa doctrine dans
tout le monde. Les instructions qu'il leur donna
montrent que les serviteurs de Dieu doivent exercer
leur charge avec fidélité, avec
désintéressement et avec courage; que
ceux qui ont le coeur bon et un
esprit paisible les reçoivent, et que ceux
qui refusent de les écouter seront
inexcusables.
2. Les plaintes et les menaces que
Jésus-Christ fait, contre ces villes de
Galilée où il avait
prêché et fait des miracles, nous
avertissent que les peuples qui sont le plus
favorisés des grâces du ciel, en
abusent souvent d'une manière criminelle, et
que ceux à qui Dieu fait annoncer sa parole,
et qui n'en profitent pas, doivent s'attendre
à la punition la plus sévère.
3. Sur ce que Jésus-Christ
dit aux soixante et dix disciples, lorsqu'ils lui
rendirent compte du succès de leur voyage et
des miracles qu'ils avaient faits, il faut
remarquer qu'il prédit la ruine prompte du
règne de satan; ce qui arriva en effet peu
après, par la prédication de
l'Évangile. Il leur déclara de plus
que, quoique ce fût un privilège bien
glorieux pour eux de chasser les démons, ils
devaient encore plus se réjouir de ce que
leurs noms étaient écrits dans le
ciel, c'est-à-dire de ce qu'ils
étaient disciples de Jésus-Christ, et
destinés à la gloire céleste.
L'avantage d'appartenir à Dieu et
d'être du nombre des vrais fidèles est
infiniment plus considérable que le pouvoir
de faire des miracles.
4. On doit aussi faire beaucoup
d'attention aux louanges que Jésus-Christ
rendait à Dieu, de ce que l'Évangile
était reçu par les petits et par les
humbles, pendant que les grands et ceux qui
étaient regardés comme les plus sages
le rejetaient. Ce n'est pas aux mondains et aux
personnes qui sont remplies de la bonne opinion
d'elles-mêmes que Dieu se
révèle; c'est aux humbles et à
ceux qui ont le coeur simple et droit.
5. Il faut bien remarquer ce que
Notre Seigneur disait si fortement à ses
disciples, qu'ils étaient heureux
d'être instruits par lui et de
connaître les vérités de
l'Évangile, que les anciens prophètes
ne connaissaient pas comme eux. Cet avantage nous
est commun avec les apôtres; mais si nous ne
profitons pas de notre bonheur, nous n'en serons
que plus misérables, et il vaudrait mieux
pour nous n'en avoir jamais joui.
CHAPITRE X.
25-42.-
Jésus-Christ
répond à un docteur de
la loi qui lui avait demandé ce qu'il
fallait faire pour avoir la vie éternelle.
2. Pour apprendre à ce
docteur qu'il n'y a point d'homme qui ne soit notre
prochain, il lui propose la parabole d'un homme qui
était tombé entre les
mains des voleurs.
3. Jésus étant
allé loger dans la maison de Marthe et de
Marie, il loue la piété de Marie, qui
se tenait auprès de lui pour
l'écouter.
I. 25-28. Il; 29-37; III. 38-42.
RÉFLEXIONS.
CETTE lecture nous donne ces trois instructions.
La première, que le principal
commandement de Dieu, et même
l'abrégé de toute la religion, est
d'aimer Dieu pardessus toutes choses, et d'aimer
notre prochain comme nous-mêmes; que c'est
là le moyen d'accomplir toute la loi et de
s'acquitter de tous nos devoirs; et qu'ainsi c'est
à quoi il faut s'attacher, si l'on veut
parvenir à la vraie et solide
piété, et par ce moyen à la
vie éternelle.
La seconde, qu'il n'y a aucun homme
qui ne soit notre prochain, et que nous ne devions
aimer. C'est ce que Jésus-Christ enseigne
par la parabole de ce Juif, qui ayant
été blessé par des voleurs, ne
fut secouru, ni par un sacrificateur, ni par un
lévite, qui étaient juifs comme lui;
mais qui fût assisté par un
samaritain, qui était un étranger, et
même d'une nation que les Juifs
haïssaient.
Le but de Jésus-Christ
était d'enseigner par là, que tous
les hommes sans exception, même les
étrangers et ceux qui ne nous aiment pas,
sont nos prochains; que nous devons les aimer tous,
leur faire du bien, et secourir les malheureux de
tout notre pouvoir. C'était là une
vérité claire et certaine, mais que
les docteurs juifs les plus éclairés
ne comprenaient pas bien.
La troisième instruction est
prise de ce qui est dit dans ce chapitre de Marthe
et de Marie. Le jugement que le Seigneur fit de la
conduite de ces deux soeurs nous enseigne que notre
principal soin doit être de nous attacher
à lui et d'écouter sa parole; que les
occupations de cette vie, quelque légitimes
qu'elles soient, ne doivent jamais nous faire
négliger la chose la plus importante, et la
seule nécessaire; et que pour être
heureux, il faut choisir, comme Marie, la bonne
part, qui ne nous sera jamais ôtée.
CHAPITRE XI.
1-28.-
Jésus-Christ
instruit ses disciples sur la
prière.
2. Il guérit un
démoniaque, et il répond aux
pharisiens qui disaient que c'était par la
puissance du diable qu'il chassait les
démons.
3. Il propose la
similitude d'un homme en qui le
mauvais esprit rentre, après en être
sorti.
4. Il parle du bonheur de ceux qui
écoutent sa parole et qui la
gardent.
I.1-13; II. 4-20; III. 21-26; IV.
27-28.
LA première instruction que le
Sauveur du monde nous donne ici concerne la
prière, et en particulier l'Oraison
Dominicale. Cette divine prière ayant
Jésus-Christ pour auteur, et renfermant tout
ce que nous devons demander de plus important, pour
la gloire de Dieu, et ensuite pour nos besoins
corporels et spirituels, nous devons la
présenter à Dieu avec un singulier
respect, avec toute l'attention possible, et en
même temps avec une confiance toute
particulière, puisqu'en demandant ce que
Notre Seigneur nous ordonne de demander, nous ne
pouvons pas douter que nos prières ne soient
conformes à la volonté de Dieu.
Jésus-Christ nous a
enseigné de plus que, si en priant les
hommes avec instance on obtient d'eux ce qu'on
souhaite, les prières obtiendront beaucoup
plus de Dieu, qui est notre père, les
véritables biens, qui sont les biens
spirituels. Tout cela doit nous exciter fortement
à prier avec zèle et à ne nous
relâcher jamais dans ce saint exercice.
2. Nous voyons dans les pharisiens,
qui attribuaient au diable les miracles que
Jésus faisait par la vertu de l'Esprit de
Dieu, que les gens qui ont un mauvais coeur,
rendent inutiles les moyens les plus efficaces que
Dieu emploie pour surmonter leur endurcissement, et
que même ils ne font que s'affermir davantage
dans leur malice.
3. La similitude du mauvais esprit,
qui rentre dans un homme après en être
sorti, signifie que les Juifs pour n'avoir pas
profité de la présence et des
miracles de Jésus-Christ, tomberaient dans
un plus grand endurcissement, et qu'ils
éprouveraient enfin la vengeance divine.
C'est aussi ce qui arrive à tous ceux qui,
après avoir reçu la grâce de
Dieu, résistent à son
opération et s'engagent de nouveau dans le
péché.
Enfin la réponse que Notre
Seigneur fit à cette femme qui admirait ses
discours, nous enseigne que ce qu'il y a de plus
glorieux et de plus avantageux pour nous, c'est
d'entendre la parole de Dieu et d'en observer les
préceptes. Cette importante instruction est
renfermée dans ces paroles de
Jésus-Christ: Heureux ceux qui entendent la
parole de Dieu et qui la
gardent.
CHAPITRE XI.
29-54.-
Notre Seigneur
reprend l'incrédulité
des Juifs, en proposant l'exemple des Ninivites et
celui de la reine de Séba.
2. Il dit que cette
incrédulité n'empêcherait pas
que sa doctrine, qui était comme une
lumière qui devait éclairer les
hommes, ne fût annoncée ; et il montre
que, pour en profiter, il faut avoir un oeil pur et
simple, c'est-à-dire l'esprit libre et
dégagé de préjugés et
de passions.
3. Étant prié à
dîner chez un pharisien, il parle contre les
pharisiens et les docteurs de la loi, il leur
reproche leur hypocrisie, leur orgueil, et leur
incrédulité; et il leur
dénonce la malédiction de Dieu.
I. 29-32; II. 33-36; III. 37-115.
RÉFLEXIONS.
JÉSUS-CHRIST nous enseigne
ici par l'exemple de la reine de Séba et
par celui des Ninivites, que ceux à qui Dieu
a accordé un plus grand degré de
lumières, et des avantages plus
considérables pour le salut, doivent
s'attendre à une condamnation plus
sévère, s'ils négligent ces
avantages, et s'ils persévèrent dans
l'incrédulité.
2. Ce que Jésus-Christ disait
de la chandelle qu'on met sur un chandelier, et de
l'oeil qui est la lumière du corps, marquait
deux choses: l'une qu'il avait donné la
connaissance de sa doctrine à ses disciples,
afin qu'ils la répandissent partout; et
l'autre, que pour recevoir cette doctrine, et pour
en connaître l'excellence, il faut que
l'esprit soit bien disposé, et que le coeur
soit pur et sincère.
3. Notre Seigneur reprochait aux
pharisiens d'observer une pureté
extérieure, d'affecter de grandes apparences
de piété, d'humilité, et de
zèle, de vertu, et de témoigner un
grand respect pour la mémoire des
prophètes; pendant qu'ils avaient le coeur
plein d'avarice et d'orgueil, qu'ils
persécutaient ceux que Dieu leur envoyait,
et qu'ils empêchaient les hommes de croire en
lui; à cause de quoi il les menace d'une
totale ruine.
Cela montre combien on se rend
coupable, lorsqu'on est possédé par
l'avarice et par l'orgueil, lorsqu'on rejette la
parole de Dieu, et qu'on en vient jusqu'à
détourner les autres hommes de la foi et de
la piété, ce qui est le comble de la
malice.
Surtout, ce discours de Notre
Seigneur nous apprend que Dieu a en horreur
l'hypocrisie, et que ceux qui s'attachent à
une pureté extérieure, et qui
négligent la
pureté du coeur et de la conscience, lui
sont en abomination.
Étudions-nous donc à
la vraie sainteté; souvenons-nous que Dieu
regarde principalement à l'intérieur,
et que le seul moyen de lui plaire est d'avoir un
coeur droit et rempli de charité,
d'être véritablement humbles, de
recevoir sa parole avec soumission, et de
contribuer de tout notre pouvoir à amener
les autres hommes à la foi et au salut.
CHAPITRE XII.
1-34.-
Ce chapitre
contient un excellent discours de
Notre Seigneur, dans lequel il exhorte ses
disciples à ne pas dissimuler les
vérités qu'ils avaient apprises de
lui, mais à les annoncer publiquement. Et
afin que la crainte des hommes ne les en
empêchât pas, il leur dit qu'ils ne
devaient craindre que Dieu, et il leur promet de
les protéger et de les assister, lorsqu'ils
paraîtraient devant les grands qui monde.
2. À l'occasion d'un homme
qui avait un différent avec un autre pour un
héritage, il parle contre l'avarice. il fait
voir, par la parabole d'un homme riche, la folie de
ceux qui ne songent qu'à amasser du bien; il
montre qu'on ne doit pas être en souci pour
les nécessités de la vie, mais qu'il
faut se reposer sur la Providence, et s'attacher
principalement à ce qui concerne le royaume
de Dieu.
Enfin il dit à ses disciples
que, quoiqu'ils fussent faibles et en petit nombre,
ils ne devaient pas craindre de manquer de ce qui
leur était nécessaire; et il les
exhorte à faire un bon usage des biens de la
terre.
I.1-12; Il. 13-34.
RÉFLEXIONS.
NOTRE Seigneur nous instruit ici sur
la profession de la vérité et sur
l'amour des biens du monde. Sur le premier article,
nous voyons dans ce chapitre, que les
chrétiens, et surtout les ministres de
Jésus-Christ, doivent faire une profession
publique de la vérité, sans avoir
peur des hommes, puisque les hommes ne peuvent tuer
que le corps, au lieu que Dieu peut envoyer le
corps et l'âme en enfer.
Par où Notre Seigneur
établit, de la manière la plus
claire, la distinction de l'âme et du corps,
l'immortalité de l'âme, et les peines
de la vie à venir. Il déclare de plus
que Dieu veille pour ceux qui le craignent et qui
souffrent à cause de lui; qu'il les assiste
par son Esprit, et qu'il reconnaîtra au
dernier jour pour siens ceux qui auront eu le
courage de se dire ses
disciples; mais qu'il ne
reconnaîtra point ceux qui, par la crainte de
la mort, n'auront pas osé faire une
confession ouverte de leur foi. Ce sont là
des considérations très-fortes, pour
nous animer à une franche et sincère
profession du christianisme.
2. Nous devons faire des
réflexions sérieuses sur ce que Notre
Seigneur a dit touchant l'amour des biens du monde,
et en particulier sur la parabole de cet homme qui
avait amassé, de grands biens et qui mourut
dans le temps qu'il croyait en jouir.
Par là Jésus-Christ a
voulu montrer que c'est une grande folie de ne
songer qu'à amasser des biens, qu'il faudra
quitter bientôt en mourant, et de
négliger d'acquérir les biens du
ciel, qui sont solides et éternels.
Il nous exhorte de plus à
n'être pas en inquiétude pour les
besoins du corps, mais à nous confier en la
Providence qui pourvoit aux
nécessités de toutes les
créatures.
Il nous dit enfin que notre grand
soin doit être de chercher avant toutes
choses le royaume de Dieu, et qu'au lieu de donner
tous nos soins aux biens de la terre et d'y mettre
notre coeur, nous devons employer ces biens en
aumônes, afin de nous assurer par ce moyen la
possession des biens éternels.
CHAPITRE XII.
35-59.-
Jésus-Christ
exhorte ses disciples à
veiller et à se préparer
continuellement à sa venue.
2. Il leur représente que les
devoirs dont il avait parlé les regardaient
d'une façon particulière, puisqu'ils
étaient comme des dispensateurs
établis dans la maison de leur maître,
pour instruire les autres; et qu'ayant reçu
une plus grande connaissance de la volonté
de Dieu, ils seraient traités avec plus de
sévérité, s'ils ne la
faisaient pas.
3. Il les avertit qu'il
s'élèverait de grands troubles dans
le monde à l'occasion de sa doctrine.
4. Il déplore l'aveuglement
des Juifs, qui ne reconnaissaient pas que le temps
de la venue du Messie était arrivé;
et il les exhorte à profiter de ce
temps-là et à se réconcilier
avec Dieu, pendant qu'ils le pouvaient.
I. 35-40; II. 41-48; III. 49-53; IV. 54-59.
RÉFLEXIONS.
CE discours de Notre Seigneur tend
à nous apprendre
1. que, puisque nous ignorons quand
il viendra, et qu'il n'y a aucun temps où
nous ne puissions être appelés
à lui rendre compte, nous devons toujours
veiller et être sans cesse
appliqués à notre devoir, afin qu'il
nous trouve occupés à bien faire;
2. que ceux à qui Dieu a
donné sa connaissance, et principalement les
ministres qu'il a établis sur son Eglise,
doivent s'en servir pour l'utilité des
autres, et pour la gloire de leur maître,
s'ils ne veulent pas être punis comme des
serviteurs infidèles; qu'en
général celui qui a connu la
volonté de Dieu, qui ne la fait pas, sera
traité avec plus de rigueur, et que Dieu
redemandera un plus grand compte à ceux
à qui il aura accordé plus de
lumières et plus de grâces.
3. Ce que Notre Seigneur dit, qu'il
était venu mettre le feu et la division dans
le monde, ne signifie pas qu'il fût venu dans
ce dessein, ni que l'Évangile tende à
diviser les hommes; au contraire, la venue de
Jésus-Christ et l'Évangile n'ont pour
but que de faire régner la paix; mais il
voulait dire que les hommes, par un effet de leur
malice, prendraient occasion de sa doctrine de se
haïr et de se persécuter.
Notre Seigneur en avertir ses
disciples, afin qu'ils ne fussent pas
ébranlés quand la chose arriverait;
ainsi nous ne devons pas non plus être
surpris, lorsque nous voyons qu'il
s'élève des troubles dans le monde
à l'occasion de la religion.
4. Jésus-Christ disait aux
Juifs qu'ils pouvaient facilement reconnaître
que les temps de la manifestation du Messie
étaient venus; mais nous devons en
être bien plus persuadés, puisque nous
en avons des preuves encore plus fortes dans tout
ce qui est arrivé depuis ce temps-là.
Ainsi nous serions entièrement inexcusables,
si nous ne profitions pas mieux que les Juifs ne
firent, du bonheur que nous avons de vivre dans un
temps où la miséricorde de Dieu est
si clairement manifestée, et si nous ne nous
hâtions pas de faire notre paix avec lui et
de prévenir son jugement, avant que nous
soyons appelés à y paraître.
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