HISTOIRE D’UN PUISSANT
RÉVEIL
VIE DE WILLIAM BRAMWELL
L'OEUVRE GLORIEUSE DU
SAINT-ESPRIT
L'année
précédente (1794) avait
commencé à Sheffield un réveil
dont le Révérend John Moon avait
ainsi rendu compte, dans une lettre adressée
au Révérend docteur Coke, le noble
« Surintendant, » bien connu dans
l’histoire du Méthodisme.
Sheffield, 22 août 1794.
« Révérend et cher Monsieur,
« A notre dernière agape trimestrielle,
à Sheffield, la flamme céleste
embrasa notre assemblée de la façon
la plus extraordinaire et la plus merveilleuse. La
réunion commença avec le calme et
l'ordre accoutumés et continua ainsi
jusqu'au moment où nous allions terminer.
Mais à ce moment, une personne vint demander
nos prières pour quelqu'un qui était
dans une grande détresse, dans le bas de la
chapelle; et, peu après, la même
demande nous fut faite pour une femme qui
était à la galerie. Je demandai alors
que deux ou trois prédicateurs laïques
allassent prier avec cette dernière
personne; car je pensais garder la
présidence de la réunion
jusqu'à la fin avec tout le décorum
possible. Mais comme c'était pour ces
prédicateurs chose nouvelle et passablement
étrange, ils paraissaient n'aller
qu'à contrecœur; ne sachant que faire,
j'hésitai un moment; puis, comme les cris de
détresse ne cessaient pas, je me
décidai à faire le sacrifice de la
régularité de la réunion afin
d'être utile dans l’œuvre qui se
présentait. Mais je dois reconnaître
que mon attachement à la forme habituelle
des réunions me fit vaquer si mal au grand
devoir qui m'incombait, que je ne trouvai presque
pas d'accès auprès de Dieu. Toujours
est-il que je n'obtins pas l'exaucement de ma
prière. Etait-ce la punition de la
répugnance que j'avais mise à
m'acquitter de mon devoir, et de la gaucherie avec
laquelle je l'avais accompli? Je ne sais.
« J'étais sur le point de quitter la
personne en détresse, quand un des
prédicateurs laïques qui étaient
en bas fit chanter un cantique et pria. La
puissance de Dieu remplit alors l'assemblée
d'une façon merveilleuse.
Instantanément et de toutes les parties de
la chapelle, les cris de détresse partirent
comme un éclat de tonnerre; de sorte que
celui qui priait, bien qu'il le fît de la
voix la plus retentissante, dut renoncer à
se faire entendre. »
« J'étais décidé à
reprendre ma place pour régulariser autant
que possible la réunion; mais avant que
j'eusse pu la reprendre, plusieurs
prédicateurs laïques s'étaient
disséminés dans l'assemblée,
et s'entretenaient et priaient avec les personnes
en détresse; d'autres venaient à moi
pour me demander ce qu'ils devaient faire et je
leur recommandais de suivre l'exemple de leurs
collègues. De sorte qu'au bout de quelques
minutes, une dizaine de groupes s'étaient
formés un peu partout; dans
l'assemblée, ayant chacun ses entretiens et
ses prières en particulier.
« Un moment après, un de mes amis
m'informa que huit ou neuf personnes dans le bas de
la chapelle, et dix-sept dans la galerie, avaient
trouvé la paix avec Dieu.
« Je n'avais jamais rien vu de semblable. Pour
un homme étranger à l’œuvre
de Dieu, la réunion n'aurait offert d'autre
spectacle que celui de la confusion; mais pour ceux
qui étaient engagés dans cette
oeuvre, elle présentait l'aspect le plus
réjouissant, le plus régulier, celui
de l’œuvre glorieuse du Saint-Esprit. Il
est certain que les cris pour obtenir
miséricorde, et les actions de grâces
pour le pardon obtenu, formaient un
délicieux concert et montaient comme un
parfum d'agréable odeur devant Dieu.
« Comme il était impossible de
continuer la réunion sous forme d'agape, les
portes de la chapelle furent ouvertes et on laissa
entrer la multitude qui était dehors.
Beaucoup de ceux qui la composaient firent
l'expérience que Dieu était
présent pour les convaincre de
péché et les attirer à lui
sans retard. Autant que nous pouvons en juger, plus
de soixante et dix personnes se convertirent avant
la fin du service.
« Le lendemain soir, pendant les
prières, le feu du Saint-Esprit fut de
nouveau répandu sur l'assemblée, et,
jusqu'à une heure fort avancée, il
abattit et consuma dans les cœurs tout ce qui
s'opposait à Dieu. En trois jours, cent
personnes ou même davantage entrèrent
dans le bienheureux royaume de notre Sauveur.
Depuis ce moment, l’œuvre s'est
poursuivie, mais d'une façon moins rapide.
Parfois quatre ou cinq personnes sont
amenées à Dieu dans une seule
réunion de prières.
« Même les petits garçons et les
petites filles ont leurs réunions de
prières entre eux. Une société
de jeunes gens se réunit tous les soirs, en
plein air, dans les champs, quand le temps est
beau; ils prient les uns pour les autres
jusqu'à ce qu'ils aient une réponse
évidente de Dieu. Deux ou trois
garçons déjà ont
été convertis dans leur
réunion.
« C'est là certainement une de ces
œuvres qui préparent graduellement la
venue de notre glorieux Rédempteur. Oui,
viens, Seigneur Jésus, viens
bientôt!
« Je suis, cher Monsieur, avec respect et
affection, à vous pour le service de
Dieu.
« John Moon ».
Quand, en juillet 1795 on sut que Bramwell
était nommé pour le circuit de
Sheffield, on conçut aussitôt
l'espérance très vive que le
réveil de la ville progresserait et
s'étendrait aux localités
avoisinantes.
Dans une lettre à son ami le
Révérend J. Drake, Bramwell rend
ainsi compte des premières journées
passées dans son nouveau circuit.
« Nous avons maison, amis et toutes les choses
temporelles qu'on peut désirer. Le peuple
est ici extrêmement sociable et, semble-t-il,
plein de droiture et de simplicité; mais
quant à la religion réelle,
c'est-à-dire à la ressemblance avec
Dieu, on en a grand besoin partout. Depuis quinze
jours que je suis arrivé dans ce circuit, le
n'ai visité que les collines du Derbyshire;
sauf le premier soir, où j'ai
prêché à Sheffield. Les
sociétés que j'ai visitées
sont petites, mais j'en ai trouvé dans
chaque localité.
« Bien que j'aie cherché avec le plus
grand soin et que j'aie visité toutes les
sociétés qui étaient sur mon
chemin, je n'ai pas trouvé une seule
personne qui connaisse la purification de tout
péché par la foi au sang de
Jésus-Christ.
« J'ai cependant constaté beaucoup de
fraternité entre chrétiens et l'on
m'a reçu avec un grand respect. Le Seigneur
a signalé sa présence avec moi dans
plusieurs localités; presque chaque soir les
auditoires ont été remués et
j'ai vu une vingtaine de personnes arriver au
salut; je crois que j’en aurais vu bien
davantage, si j'avais pu trouver un homme de
prière. J'ai vu beaucoup d'excellentes
personnes, mais aucune qui sache lutter avec Dieu.
Dans deux ou trois endroits, nous avons vu des
personnes crier à Dieu pour obtenir
grâce, et nous en avons laissé
plusieurs dans une profonde détresse.
« Je retourne demain à Sheffield et j'y
reste quinze jours. Je voudrais, par la puissance
de Dieu, faire chaque chose comme si c'était
la dernière de ma vie. Oh ! priez que le
bras de Dieu se montre dans cette ville ! Je
bénis Dieu de ce qu'il m'a accompagné
à la campagne et je compte qu'il sera avec
moi à la ville...
« Un fait merveilleux a eu lieu le jour de mon
arrivée à Sheffield. A Eyram,
à quelques milles de la ville, un membre de
notre société, une femme qui
était complètement aveugle depuis six
ans, a recouvré instantanément la
vue, de sorte que des actions de grâces
publiques en ont été rendues à
Sheffield, dans notre chapelle. Voici comment sa
guérison a eu lieu.
« Étant très pauvre, elle criait
à Dieu pour qu'il lui donnas le moyen de
gagner son pain et celui de ses enfants. Dieu
entendit ses prières et lui ouvrit
miraculeusement les yeux au grand étonnement
de tous. Quand cela arriva, ses enfants coururent
dans la rue en criant: « Notre mère
voit ! notre mère voit ! » et
aussitôt leur maison se remplit de gens qui
se joignirent à leur mère pour louer
Dieu. La vue de cette femme continue à
être bonne. O Dieu ! que ne peux-tu pas faire
! »
Nous avons vu que Bramwell prêchait
l’entière sanctification possible par
la foi au «sang
de Jésus-Christ qui purifie de tout
péché, » et qu'il en proclamait la
nécessité actuelle. Or, il ne
prêchait point cette doctrine avec
hésitation ou timidité; au contraire
jamais il ne prêchait avec plus de force que
lorsqu'il en venait à ce point-là. Au
reste, sa prédication, disent les
contemporains, était toujours une
véritable «démonstration
d'esprit et de puissance. » Et jamais il ne se
lassait de rechercher de nouveau « la
plénitude de l’Esprit. »
Chacune de ses prédications n'en
était pas moins le fruit d'un grand travail.
Il mettait un soin extrême à faire ses
plans de sermons; il en avait toujours, en
réserve, un bon nombre qu'il perfectionnait
de son mieux. Quant aux Saintes-Écritures,
il les étudiait dans le texte original qu'il
lisait couramment aussi bien lorsqu'il s'agissait
de (l’Ancien Testament que du Nouveau.
Dès l’âge de dix-sept ans il
avait poursuivi cette étude avec une
énergie et une ardeur qu'on a peine à
se représenter.
Les règles de Wesley que Bramwell
reçut avec le plus profond sérieux
recommandent à tout prédicateur de se
lever de grand matin. Or, sauf le petit nombre
d'années où sa, santé
affaiblie l’obligea de se lever à cinq
heures en hiver, il se leva toujours, hiver comme
été, à quatre heures.
A peine levé, il se vouait à la
prière et à la méditation des
Écritures, luttes et travaux qu'il
poursuivait bien des heures sans s'arrêter.
Aimant son prochain comme lui-même, il priait
pour son prochain comme on prie pour
soi-même. Il le faisait pour chaque personne
nominalement, entrant dans ses circonstances
particulières. Quoi d'étonnant
dès lors qu'il pût prier chaque jour
tant d'heures consécutives ?
Sa douceur et sa patience ne se démentaient
jamais; sa bonté envers tout le monde, sa
compassion, sa tendresse envers ceux qui souffrent
étaient inépuisables. Sigston
racontant son ministère à Sheffield,
nous dit qu'il sacrifiait souvent son confort pour
assister de plus dénués que lui. Il
était cependant fort prudent, et tenait
à s'assurer par lui-même de la
position de ceux qui sollicitaient ses secours.
« Pendant un hiver rigoureux, dit le
témoin cité plus haut, nous
l’avons vu donner sa seule redingote à
un homme qui n'avait pas d'habit. Pendant que nous
visitions avec lui un malade qui était dans
la plus grande indigence et qui n'avait pas
même une chemise, nous l'avons vu entrer dans
un réduit voisin, et, après avoir
tiré ce vêtement de dessous,
l’apporter au malade. »
Sa réputation de sainteté
s'étendait au loin, de sorte que beaucoup de
gens pensaient le connaître et n'avaient
cependant que des idées erronées
à son sujet. On se représentait
volontiers le serviteur de Dieu comme un personnage
d'une gravité imperturbable; critique
sévère, sombre, anxieux; toujours
solennel, abîmé dans les
méditations les plus profondes. Puis, quand
on le rencontrait, on était tout surpris de
le trouver si jovial, si aimable, si heureux du
bonheur d'autrui. Quand la société
était nombreuse et la conversation peu
profitable, il parlait peu et paraissait
réservé; mais ses paroles ne
tendaient jamais à déprimer à
décourager; elles tendaient au contraire
à vivifier, à ranimer les bons
sentiments et les nobles instincts. Dans la
société des chrétiens
sanctifiés, toute réserve
disparaissait.
Bramwell ne pouvait être satisfait à
la pensée de travailler lui seul, il voulait
la coopération de tous. Afin de poursuivre
l’œuvre de la sanctification des
chrétiens, il forma à Sheffield une
association de quelques personnes choisies qui se
réunissaient de grand matin, une fois par
semaine. Cette réunion de personnes, dont
les noms nous ont été
conservés, a été une abondante
source de bénédictions pour toutes
les églises de la contrée. Au reste,
partout où Bramwell exerçait son
ministère, il formait une association de
chrétiens soigneusement choisis pour
l’aider dans tout son travail spirituel,
particulièrement dans la prière.
Aussi eut-il des auxiliaires précieux dans
toutes les localités du circuit; et
bientôt l'action du Saint-Esprit se manifesta
avec puissance, à la campagne comme à
la ville.
Beaucoup de personnes, et dans le nombre bien des
prédicateurs, entendant parler de
l’œuvre qui se poursuivait à
Sheffield parmi les chrétiens, vinrent de
localités éloignées pour
rechercher la grâce de la purification du
cœur; elles l'obtinrent et s'en
retournèrent louant et bénissant
Dieu.
Trois semaines seulement après son
installation à Sheffield, Bramwell
écrit au Rév. Marsden :
« Au jour fixé pour les actions de
grâce, Dieu se manifesta puissamment ici
à Sheffield, à notre service du soir,
dans la chapelle. Beaucoup d'âmes avaient
trouvé la paix avec Dieu dans les
réunions de classes et dans les
réunions de prières; mais ce
soir-là nous eûmes une effusion de
l’Esprit sur toute l’assemblée.
Nous demandâmes que toutes les personnes en
détresse se rendissent dans la sacristie; ce
qu'elles firent, et huit d'entre elles y furent
délivrées de l'esclavage du
péché. Huit autres reçurent le
pardon le dimanche suivant. Le lendemain, nous
avions notre agape; et, vers la fin du service, la
puissance de Dieu vint sur nous. Nous
terminâmes alors la réunion comme
à l’ordinaire, mais nous
invitâmes à rester toutes les
personnes qui étaient dans la
détresse; et, avant huit heures du soir,
plus de vingt d'entre elles étaient
délivrées de leurs angoisses, par la
foi au sang de Jésus-Christ. Depuis ce
moment, l’œuvre a progressé chaque
jour. Plus de vingt personnes, dans deux classes,
ont reçu le salut. Et j'ai la preuve
manifeste que plus de cent personnes ont
trouvé la paix avec Dieu pendant ces trois
semaines. Oh! priez pour nous que rien ne vienne
arrêter l’œuvre de Dieu !
»
En novembre 1795, il écrit
« J'ai la certitude que je fais des
progrès dans la grâce. Voir Dieu et
l'aimer, voilà mon travail. J'ai remis
toutes choses entre ses mains et je n'ai pas
d'autre soin que de lui plaire. Je suis mort et ma
vie est cachée avec Christ en Dieu.
»
Et dans une autre lettre
« Je suis toujours uni à Dieu. Dans les
plus grandes afflictions, je ne sens autre chose en
mon cœur que le plus pur amour. Je suis
souvent puissamment tenté, comme le fut
notre Seigneur; mais je suis gardé et je
progresse. Il y a communication continuelle entre
Dieu et mon âme, dans la prière,
l'amour et la gratitude. Dépendant du
Seigneur pour toutes choses, je suis constamment
dans le ciel. Je me sens plus faible que jamais,
mais Dieu est mon tout. »
Dans une autre lettre adressée à la
Société de Liverpool nous lisons
« Le salut des âmes est la gloire du
ministère. Verrons-nous la gloire se
répandre ou disparaître? Je m'abreuve
de plus en plus à la source des eaux vives;
et, priant sans cesse, je sais que je serai rempli
de toute la plénitude de Dieu. Je suis de
plus en plus navré en voyant
l'incrédulité générale.
Oh! qu'elle déshonore Dieu! Tout nous a
été donné, et nous devons
recevoir tout. »
Le 17 décembre 1795, il raconte ainsi les
progrès du réveil de Sheffield
à son ami le Rév. Joseph Drake
« Je suis plus que jamais
émerveillé de la bonté de
Dieu. Vraiment « ses voies sont
merveilleuses ». Plusieurs faits dont
vous avez pu entendre parler me prendraient trop de
temps si je voulais en parler à mon tour;
mais je ne pourrai jamais assez bénir Dieu
à leur sujet. J'ai eu un grand travail
à faire. J'ai délivré environ
douze cents cartes de membres aux personnes qui se
sont jointes à la société,
à Sheffield, pendant ces cinq derniers
mois.
« En plusieurs de nos classes, beaucoup de
personnes ont trouvé la sanctification. ! Je
n'ai pas vu plus de trois classes qui aient encore
des personnes n'ayant pas obtenu cette grâce.
C'est ce résultat qui m'a coûté
le plus grand travail que j'aie encore
accompli.
« Ce dernier dimanche, nos deux
chapelles étaient pleines. Après la
prédication, à celle de Garden
street, la puissance de Dieu descendit sur
l'assemblée: un cri se fit entendre dans les
galeries. Je ne puis dire combien de personnes ont
reçu le salut; j'en ai laissé
plusieurs dans la détresse.
« Quand j'arrivai ici, je vous écrivis
que je ne trouvais rien de fait quant à
l’œuvre de la sanctification; mais
maintenant je suis étonné de la
rapidité avec laquelle cette oeuvre s'est
faite en beaucoup de localités.
« Mon souci au sujet des âmes est grand.
Ces derniers temps, je ne suis jamais allé
dîner ou prendre le thé chez
quelqu'un, sans que des personnes, venues
exprès pour me voir n'aient trouvé le
salut après quelques moments d'entretien. Ce
mois-ci, c'est à peine si j'ai jamais eu le
temps de lire une page entière. Que le
Seigneur me donne de faire sa volonté!
Gagner des âmes, c'est la meilleure de toutes
les occupations. »
Bramwell n'avait vraiment qu'une seule
pensée, une seule affaire: gagner des
âmes à Jésus-Christ. Qu'il
fût dans l'intimité de la vie
privée, ou qu'il parlât en public, il
n'avait d'autre souci que la
prospérité spirituelle de ceux qui
l'entouraient. Il put leur dire avec une
entière vérité, comme
l'apôtre Paul: « De même qu'une
nourrice prend un tendre soin de ses enfants,
j'aurais voulu, dans ma vive affection pour vous,
non seulement vous donner l'Evangile de Dieu, mais
encore ma propre vie, tant vous m'étiez
devenus chers. »
« J'ai eu le privilège, dit un de ses
intimes amis, d'observer attentivement sa conduite
vraiment exemplaire en société. Sa
conversation tendait au plus haut point à
« communiquer la grâce à ceux qui
l'entendaient.» Il cherchait toujours à
amener la conversation sur ce sujet: un plein et
entier salut possible maintenant.
« Il m'invita, à la
Conférence de Londres, à passer une
après-midi avec lui chez des amis dans la
Cité. J'y allai, et dès mon
entrée dans la maison, j'entendis la voix de
gens qui priaient avec ferveur; c'était M.
Bramwell et ses amis. Au thé, il ne fut pas
question de parler de politique, ni de choses
quelconques de ce monde; M. Bramwell tint
l'attention de chacun fixée sur la question
du salut dans le présent et dans
l'éternité. Dès que quelqu'un
introduisait une autre question, il
l'écartait en s'écriant : « Nous
voici hors de la voie ! » Après un
entretien des plus sérieux; toute la
société s'unit de nouveau pour faire
monter à Dieu les prières les plus
ferventes jusqu'à « ce que le ciel
nous parut s'ouvrir et que nous fûmes remplis
de sa lumière et de sa joie. »
Enrichi de tous les fruits de l'Esprit, qui se
montraient en lui avec abondance, Bramwell
soupirait constamment après un plus haut
degré de sainteté, une connaissance
plus complète de Dieu, un plus grand amour
pour lui.
Le 24 mars 1796, il écrit à Joseph
Drake
« J'espère que vous avez toujours la
même ardeur pour la prière et la
prédication. Il y a au jour douze heures
pendant lesquelles l'homme doit travailler. Notre
temps, c'est le moment présent; c'est
maintenant que nous devons nous amasser un
trésor au ciel.
Je vous en prie, considérez-vous comme un
serviteur de Dieu envoyé dans le monde pour
porter la croix, l'opprobre; aimer vos ennemis et
prier pour les meurtriers. Quelle compassion il y
avait dans le cœur de Jésus-Christ ! et
cette compassion peut être en nous !
« Je prie pour
eux, » dit
Jésus. Oh! prière bénie !
Combien je désire prier comme lui! et il
peut nous enseigner cela par son Saint-Esprit.
« Si c'est toujours dans la foi et l'amour, et
pour la couronne incorruptible, que vous parlez et
agissez, bienheureux êtes-vous. Je me vois
plus petit et plus misérable que jamais. Oh!
combien je me sens couvert de honte ! je suis
confus devant Dieu.
« Chaque jour des âmes sont
réveillées et converties dans les
diverses parties de notre circuit. A Sheffield un
grand nombre ont reçu la sanctification et
en jouissent réellement. O Seigneur, que ta
grâce soit sur nous et tous ceux qui nous
entourent! garde-nous dans la paix et dans l'amour!
Soyons tous unis dans la supplication pour que Dieu
remplisse de gloire notre pays et que toutes les
nations apprennent à le connaître!
»
La veille de la Conférence annuelle, il
écrit au même ami :
« Je suis émerveillé de la
bonté de Dieu. Il ne nous abandonnera, ni ne
nous oubliera jamais. Quand nous recevons son Fils,
nous sommes précieux à ses yeux.
« O mon frère! continuez à
être ferme et décidé dans
l'accomplissement de la volonté de
Dieu...
« Mon amour pour le Circuit de Birstal a
été abondant; mais quand je pense aux
agneaux de Dewsbury, ma pensée reste
attachée à eux. Oh ! priez toujours
pour eux et pour toute leur ville! Nous n'avons
besoin que d'une seule chose, qu'il y ait plus de
l'Esprit de Dieu parmi nous; que le Seigneur le
répande sur tous à la
Conférence! »
« L'œuvre de Dieu continue et devient
extrêmement profonde dans notre circuit.
Chaque jour des âmes y sont amenées
à Dieu; plusieurs conversions remarquables
ont eu lieu dernièrement parmi les personnes
âgées.
« L'Esprit de Jésus-Christ s'est
montré plus abondant que jamais dans ma
famille. Oh! Béni soit Dieu! je vois bien
que chaque semaine Satan trame quelque intrigue
pour arrêter et détruire
l’œuvre du Seigneur; mais il est
déjoué.
Le même jour, Bramwell écrit encore,
à un ami, une longue lettre où nous
lisons
« Je vois dans quel misérable
état se trouve tout le monde; personne n'a
vraiment la paix, sauf ceux qui ont tout
quitté pour Jésus-Christ et qui le
suivent. Ceux-là seuls qui se sont
abandonnés à Dieu et qui vivent dans
la prière continuelle, sont gens pratiques,
pour la terre et pour le ciel; Ils traversent le
monde avec calme; ils sont résignés
à toute croix que Dieu voudra leur envoyer,
et c'est de la plus grande croix qu'ils font leur
plus grande gloire. Ceux qui ne se sont pas
abandonnés à Dieu, pour vivre dans la
prière, trouvent dans chaque croix un sujet
de perplexité qui leur enlève le peu
d'amour et de patience qu'ils ont. Être tout
rempli de vie pour Dieu, c'est en quelque sorte
jouir deux fois du ciel; tandis que ceux qui sont
inconstants, n'étant pas entièrement
chrétiens, souffrent deux enfers.
« O mon frère, j'espère que vous
et votre maison vous servirez l'Eternel. Je vous en
supplie, et je vous en supplie avec larmes, soyez
entièrement consacré à Dieu,
et recevez les serviteurs de Dieu sous votre toit.
Rappelez-vous la maison d'Obed
Edom. »
Le 12 septembre 1796, Bramwell écrit
à M. Drake :
« O mon frère, je suis plus que jamais
honteux de moi-même. Je gémis aux
pieds du Seigneur, soupirant après une
« profondeur de salut » que je n'ai pas
encore. Je vous assure qu'intérieurement je
tends de toutes mes forces vers le ciel. J'ai
besoin des prières de tous. Mon âme
lutte continuellement avec Dieu. Je puis vous dire
que je suis tout à fait fatigué de ma
manière de vivre; elle est tellement
au-dessous de mes privilèges ! Être
purifié de tout péché n'est
qu'une préparation, une condition de la
croissance spirituelle.
« Dieu nous donne sa paix dans tout notre
circuit. En me tenant tout à fait en repos,
j'ai vu encore une fois le salut de Dieu; mais non
pas sans lutter dans la prière.
L’œuvre avance; beaucoup de gens, riches
et pauvres, ont été amenés ces
derniers temps au Seigneur. Gloire, gloire soit
à Dieu! Mais nous avons besoin d'un beaucoup
plus grand réveil dans tout le circuit.
»
Un médecin distingué de Nottingham,
ami de Bramwell, le Dr Taft, s'était
récemment donné à Dieu et
avait aussitôt quitté sa nombreuse
clientèle pour se consacrer
entièrement à l’œuvre du
Seigneur. Bramwell lui écrit
« O mon frère Taft, donnez-vous
vous-même à Dieu avec beaucoup de
prières et de foi; gardez-vous autant que
possible sérieux, recueilli, ne laissez pas
les petites choses dissiper vos pensées,
tenez-vous fixé en Dieu. Le monde vous
tentera et cherchera à vous attirer à
lui; mais votre travail est pour Dieu, pour
l’éternité, pour la gloire.
Combattez le bon combat de la foi, soyez vainqueur
par le sang de l'Agneau. Je crois que vous recevrez
la couronne. Si vous n'êtes pas appelé
à prêcher, à exhorter ou
enseigner, vous l'êtes à vivre,
à prier, à agir avec Dieu. Ne
craignez rien. Veillez ; et attendez dans la foi
pour recevoir tout ce que Dieu veut vous
donner.
« Je cherche le Seigneur chaque jour. Je fais
des progrès dans la grâce, j'en suis
certain. Voir Dieu et l'aimer, c'est mon occupation
constante. Je lui suis plus fortement uni que
lorsque j'étais auprès de vous. J'ai
remis tout entre ses mains; je n'ai pas d'autre
souci que de lui plaire. Je suis mort et ma vie est
cachée avec Christ en Dieu. Je puis le dire,
ce n'est pas moi qui vis, c'est Christ qui vit en
moi. « L'œuvre de Dieu devient de ;plus
en plus profonde chez les siens, je le vois; et
depuis quelques semaines, tous les jours des
âmes se donnent à Dieu.
« Je vis au-dessus des divisions qui font
maintenant tant de mal parmi les chrétiens
autour de nous; (1) j'attends l’issue en paix: la
volonté de Dieu soit faite et non la mienne
i Quand nous serons tous humiliés par ces
divisions, nous nous tendrons la main et nous
donnerons tous gloire à Dieu, j'en ai la
confiance. Je me sens plein de compassion; mes
entrailles s'émeuvent pour tous les hommes;
il ne me serait pas possible de dire du mal de qui
que ce fût. »
Bramwell avait été nommé
prédicateur du Circuit de Sheffield pour
deux ans; mais, ce temps écoulé, la
Conférence de juillet 1797 le
réélut au même poste pour une
troisième année.
Dans une de ses lettres, datée du 30
novembre 1797, et adressée à un de
ses collègues, nous lisons :
« Oh ! comme mon âme s'est
émue au sujet des pêcheurs! Je
pourrais les supplier de revenir à Dieu
jusqu'à exhaler mon dernier souffle. Quand
je pense à eux, je m'enfonce souvent dans un
abîme d'amour et de larmes.
« Ma femme vit près de Dieu. Je suis
tout confus quand je suis avec elle; elle est
vraiment montée plus haut que moi. Oh!
puissé-je courir plus vite dans cette voie
bénie de l'amour !...
« Il se fait maintenant une oeuvre chez
beaucoup de personnes qui fréquentent nos
réunions, et j'ai confiance quelle aboutira
à leur salut...
« J'espère que vous faites chaque
semaine des progrès dans la
prédication: progresser, c'est notre
privilège. O mon frère, prenez la
résolution de vous lever de bonne heure pour
la prière et la lecture; que la chair ni le
sang ne vous arrêtent; ce point gagné,
tous les autres le seront. Lisez beaucoup et
faites-le toujours la plume à la main. Ayez
toujours vos plans de sermons dans le livre que
vous lisez, avec une table alphabétique
où vous consignerez vos plans et vos notes
de lectures. Vous éviterez ainsi de
répéter les mêmes choses dans
vos prédications. Il faut que vous deveniez
un nouveau prédicateur cette année.
Le Seigneur est et sera avec vous. Je prie pour
vous; puissiez-vous prier pour moi! Je vis avec
Dieu en Christ. Je n'ai qu'un désir :
connaître et faire sa volonté en
toutes choses. »
Le 27 mars 1798, Bramwell écrit :
« Je vois la gloire du Seigneur : je vis avec
lui. Je ne suis rien, je n'ai rien. Oh ! mon
âme brûle d'ardeur pour sa gloire! A
chaque réunion, je vois des âmes
sauvées. »
« Je brûle du désir
d'être utile en ce monde. Me voici, Seigneur,
envoie-moi!... « Il y a eu dimanche huit
jours, j'ai vu l'Esprit opérer en quelque
mesure comme au temps de la première
Pentecôte. A la réunion du soir, un
incrédule tout à fait déiste,
fut frappé par la lumière divine
comme par un éclair et fut, pendant environ
vingt minutes, dans la plus grande détresse;
il gémissait et se lamentait dans une
véritable agonie d'esprit. Tous ceux qui
l’entouraient étaient en larmes, et le
Seigneur Jésus le sauva de ses
péchés. Cet homme alors
s'écria : « Je veux le proclamer
hautement et je veux l'écrire et le publier
: Jésus Christ est le Fils de Dieu !
« Sept âmes encore furent mises en
liberté ce même soir; et, depuis lors,
j'ai vu chaque soir des personnes parvenir au
salut. »
Le lecteur comprendra aisément que toutes
ces personnes étaient amenées au
Sauveur par le moyen de la prédication de
Bramwell.
Un de ses collègues, le Rév. James
Wood, homme d'une grande piété, nous
a laissé un récit de la
réunion du premier de l'an 1798, à
Sheffield, à laquelle prenait part
Bramwell.
« Le jour de l'An, les membres de notre
société se réunirent pour
renouveler leur alliance avec Dieu.
« Dès le commencement du service, nous
avions tous le sentiment profondément
solennel de la présence de Dieu au milieu de
nous; et, pendant qu'on lisait les directions ayant
trait au renouvellement de notre alliance avec
Dieu, l'assemblée montra le plus profond
sérieux et l’attention la plus
soutenue. Cette lecture finie, nous fûmes
pressés de nous recueillir, de
considérer l'importance du sujet et de prier
pour être rendus capables de nous consacrer
entièrement à Dieu et de nous
conduire d'une manière conforme à nos
vœux. Un temps suffisant nous fut ensuite
donné, soit pour nous recueillir dans le
silence devant Dieu, soit pour lui exprimer
à haute voix nos désirs.
« La présence de Dieu se fit
généralement sentir pendant le
silence, et notre ami Bramwell fut tellement
pénétré de la sainte influence
de l'Esprit de Dieu qu'il s'écria :
«Gloire, gloire, gloire soit à Dieu !
le Seigneur vient. » Toute l'assemblée
se sentit alors subjuguée par la
surabondante grâce de Dieu.
« J'ai entendu parler ensuite de sept
personnes qui trouvèrent la paix avec Dieu
pendant le temps que nous avions passé en
silence devant Lui; et plusieurs autres la
trouvèrent plus tard. Je n'ai guère
vu de pareil « temps de rafraîchissement
de par la présence du Seigneur » dans
une si grande congrégation. Ce ne fut pas
une visite passagère de Dieu, ce fut une
bénédiction intérieure et
permanente qui nous fut donnée alors. Ce ne
fut pas un contact superficiel, mais le sceau de
Dieu mis sur un grand nombre d'âmes; son
image, son caractère moral fut formé
en elles. Ce fut pour nous une
représentation de la première
Pentecôte. Il fut évident que
l’effet moral si béni de cette
journée n'avait point été
obtenu par quelque pouvoir humain, mais par
l’Esprit du Seigneur. »
La dernière assemblée trimestrielle
à laquelle Bramwell prit part, à
Sheffield (1798), fut remarquable. « Cette
Réunion de Prédicateurs, dit Longden
(2), surpassa en plénitude
d’amour et de puissance divine tout ce
qu'aucun prédicateur avait vu jusqu'à
ce jour. M. Wood voulut! raconter son
expérience; mais il était tellement
ému qu'il ne put parler. M. Bramwell voulut
prier, mais il ne put articuler un mot, tant il
était rempli d'émotion et
d'attendrissement. M. Pipe s'écriait :
« Gloire, gloire, gloire à Dieu dans
les deux très hauts! » Tous les
prédicateurs laïques, excepté
deux, avaient le témoignage bien net de leur
entière sanctification; et les deux qui
n'avaient pas encore cette grâce, la
reçurent avant la fin de la réunion.
»
Quelques mois après avoir quitté le
Circuit de Sheffield, Bramwell fut appelé
à y revenir pour solliciter des dons en
faveur d'une chapelle â bâtir à
Nottingham. Longden écrit à ce sujet
dans son journal :
« Nous ne pourrons jamais oublier
l'expression de M. Bramwell quand il fit son
apparition dans la chapelle. Il n'avait averti
personne de son arrivée; et sa vue produisit
un effet étonnant; ce fut comme une
commotion électrique. Le souvenir de tant de
moments heureux passés avec lui, en public
et en particulier, subjuguait tous les cœurs.
L'assemblée ne put plus chanter, et ses
ministres bien aimés ne purent plus ni
prêcher ni prier, sans faire les plus grands
efforts, car ils étaient fréquemment
interrompus. La joie était vraiment
extatique.
« Quand on sut pourquoi M. Bramwell
était venu, on rivalisa tellement d'ardeur
pour le combler de dons, qu'on aurait dit que
chacun allait lui donner tout ce qu'il
possédait.
La charité de ses frères était
si vive et si prodigue, qu'il dut les
modérer et mettre des bornes aux dons d'un
grand nombre; il fût enfin tellement
pressé par l'amour et la gratitude de tous,
qu'il dut quitter soudain la ville, afin que les
pauvres ne fissent pas pour lui au delà de
ce que permettaient leurs ressources. Une multitude
de gens lui avaient apporté
spontanément leurs offrandes sans s'informer
en aucune façon de l'usage qu'on en devait
faire; ils tenaient à témoigner ainsi
leur amour pour le pasteur
vénéré qui avait porté
leurs peines et partagé leurs joies.
»
Longden écrit encore
« M. Bramwell, ce saint et infatigable
serviteur de Dieu, a travaillé trois
années au milieu de nous, et pendant ce
temps de quinze à dix-huit cents personnes
ont été ajoutées à
notre société. J'ai été
très frappé de sa manière de
faire et de l’Esprit qui l'anime; je n'ai
jamais vu en aucun homme un amour aussi
brûlant pour Dieu et pour le prochain, un
zèle et une énergie aussi
infatigables pour prêcher, prier et faire des
visites de maison en maison. J'ai eu le bonheur
d'obtenir sa confiance et d'entrer dans son
intimité, et j'y ai gagné plus de
connaissance et de sainteté que dans mes
rapports avec tous les autres hommes. Je n'avais
pas encore une vue bien claire de la sanctification
que, par conséquent je ne possédais
pas encore. Mais quand je vis en quoi consistait
cette grâce, je compris que nous pouvons
l’obtenir et la garder. Je n'eus pas
d'hésitation; par la grâce de Dieu, je
pus me consacrer entièrement à Lui
ainsi. que tout ce que je possédais. Mais je
me sentis plus que jamais humilié en voyant
tout ce qui me manquait encore. Enfin,
j'aperçus une voie plus étroite ; et
plus excellente pour être « fortifié à
tous égards par sa puissance glorieuse, et
être toujours et avec joie,
persévérant et patient, rempli de
toute la plénitude de Dieu.
»
Bramwell avait trouvé en Longden un ami
selon son cœur. C'était pour l'un et
l’autre un bonheur que de travailler et prier
ensemble. Le 28 juillet 1798, au moment où
Bramwell quittait se circuit de Sheffield, Longden
écrit dans son journal : « J'ai
passé une semaine dans le Derbyshire avec M,
Bramwell; Dieu le reconnaît pour son
serviteur et lui donne succès où que
ce soit qu'il aille. J'ai bu à plus grands
traits que jamais dans la coupe de l'amour divin.
J'ai besoin d'être rempli de cet amour,
animé et enflammé par lui
continuellement. »
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