Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



MOODY
PÊCHEUR D'HOMMES - MILITANT DES U. C. J. G.



CHAPITRE II
À CHICAGO
VIE D'AFFAIRES ET VOCATION

La vie d'affaires

En 1856, Chicago avait quatre-vingt-quatre mille habitants. Vingt ans plus tard, elle en comptait quatre fois plus. Construite au bord du lac Michigan, sur un sol marécageux, mais dans une situation avantageuse, au point de croisement des plus grandes voies de communication qui reliaient les États de l'Est à ceux du Centre, elle attirait de partout un flot de gens avides de faire fortune.

Mélange singulier de races et de langues, de travail et de plaisir, où le luxe des nouveaux riches voisinait avec une grande misère et des ruines lamentables. L'extension de la ville avait été trop rapide pour que l'on pût imposer un plan d'aménagement général. Les banques, les magasins étaient construits en briques et en pierre, le reste en bois. il fallait souvent, pour passer d'une rue à l'autre, monter ou descendre plusieurs marches. Le quartier des affaires débordant toujours davantage, bureaux, entrepôts, usines, maisons d'habitation et bas-fonds s'entremêlaient étrangement. Les temps ont bien changé depuis !

Le jeune paysan de Northfield fut témoin de ces prodigieuses transformations. Il donne, dans une de ses premières lettres, ses impressions de nouveau venu et voit d'abord les choses sous un jour assez favorable. Ah ! quel, contraste avec la Nouvelle-Angleterre !
«Vous aimeriez sans doute savoir comment se présente Chicago. Eh bien ! si vous prenez une carte, vous constaterez que le lac est presque au même niveau que la ville même. Je crois qu'il n'y a qu'une différence de trois pieds au plus. Sauf deux ou trois mois de l'année, l'eau recouvre la chaussée ; on est obligé d'établir des trottoirs en planches pour les piétons. Bien que sales, les rues sont larges et droites. Vous pouvez regarder aussi loin que possible, essayer de sortir de la ville, mais vous aurez peine à atteindre ses limites. La population est si peu dense qu'elle couvre un espace quadruple de celui de Boston. On trouve ici les plus belles maisons que j'aie jamais vues. Les hommes établis depuis dix ans «valent» de dix à cinquante mille dollars. On voit rarement un pauvre, et il y a peu de voleurs. Vous ne me reconnaîtriez pas, j'ai augmenté de dix kilos environ. Bonne nuit !».

Première impression sans doute. Dwight ne tardera pas à voir ce qui se cache derrière cette apparente prospérité, et cette constatation aura sur sa destinée une influence déterminante.

Il y eut des heures où, perdu dans la foule étrangère, l'aventureux garçon risqua de sombrer dans le plus noir découragement. Encore un peu et il eût regretté Boston ! Mais pour l'abattre il en fallait davantage ; le commerçant et le croyant qui étaient en lui nourrissaient de vastes ambitions. Il était d'autant plus décidé à se créer une situation que, jusqu'ici, ses ressources étaient restées modestes et qu'il désirait pouvoir aider sa mère. D'autre part, son zèle chrétien lui ouvrait les yeux sur les abîmes de souffrance et de désordre où toute une population, surtout de jeunes gens sans appui, végétait ou sombrait, victime du paupérisme, de l'alcool, du jeu ou des plaisirs grossiers.

Au début, le commerce et le travail pour Dieu allaient de pair. Ardent en toutes ses entreprises, le fils de Betsy Moody était un consciencieux : il se fit apprécier par son sens des affaires autant que par ses dons d'organisation. Comme à Boston, il a trouvé emploi chez un négociant en chaussures. Heureux dans son métier, il sent néanmoins qu'il doit veiller pour rester fidèle à son idéal chrétien :
«Je puis gagner ici en une semaine davantage que je ne gagnais à Boston en un mois », écrit-il à son frère aîné. «Mais ce n'est pas tout : j'ai plus de joies spirituelles que jamais. Je trouve que mieux je me conduis plus Je jouis de tout ; plus je pense à Dieu et à Son amour moins je pense aux misères de ce monde... C'est pour éprouver notre foi que Dieu permet ce qui nous arrive ; Il veut voir si nous tiendrons. Prions l'un pour l'autre comme le doivent des chrétiens »...

À sa mère : «... J'ai une bonne situation et je ferai de mon mieux pour l'améliorer encore. Jusqu'à présent, tout m'a réussi et, sauf imprévu, tout ira bien. Mon frère Luther a cru que je commettais une folie de quitter Boston, mais la place que j'ai trouvée ici est bien supérieure. Si ma santé demeure ce qu'elle est et si mon Dieu est avec moi, j'aurai réussi au-delà de mes espérances. Mais n'oublie pas de prier pour ton fils, de toutes parts environné de tentations. Depuis ma conversion je n'ai jamais travaillé dans une ville où il y eût tant de jeunes gens dissipés. J'espère que tu intercéderas auprès de Dieu afin qu'Il m'aide à mener une vie vraiment chrétienne aux yeux de cette jeunesse, et afin qu'elle-même ne m'entraîne pas au mal. je voudrais vivre de manière à l'amener à Jésus-Christ. Prie pour moi, chère maman ! ... »

Trois mois après son arrivée, son gain est de trente dollars par semaine, large salaire, à cette époque, pour un «moins de vingt ans». Les clients de la maison aiment à s'adresser à lui.

Au bout de deux ans, on lui confie le service de propagande dans la ville entière. Toujours économe, toujours exact, il brûle d'amasser beaucoup d'argent. Bientôt, on lui offre une place de voyageur. Il parcourt la région qu'on appelle le Middle-West. Moins d'un an après, son chef meurt, et le poste de liquidateur de la succession lui est confié. Il fait des spéculations fructueuses sur les terrains. Humainement parlant, l'avenir du jeune homme est assuré et il sera brillant. Mais Dieu, qui a la direction des affaires de son âme, ne semble pas avoir encore un contrôle absolu sur celles de ce monde.

O surprise ! à ce même moment, on apprend que pour servir son Maître, le jeune commis voyageur a renoncé définitivement au commerce. Comment donc est-il arrivé à cette grave détermination ?

La vocation

Fidèle à l'engagement pris lors de son affiliation à l'Église de Mount-Vermont, Moody, dès son arrivée à Chicago, avait adhéré à la. communauté dite «des Frères de Plymouth» (1#2) dont il souhaitait assurer le recrutement parmi les jeunes. Puis il se rattacha à une classe biblique de l'Église méthodiste, car il sentait le besoin d'enrichir ses connaissances et d'exercer une activité plus grande. Il s'offrit comme moniteur : on l'agréa, mais à condition qu'il recruterait lui-même ses élèves. Heureux défi ! Dès le dimanche suivant, Moody en amènera dix-huit, tous va-nu-pieds, en haillons, qu'il a été découvrir dans un quartier misérable : «Chacun d'eux», s'écrie-t-il, «a pourtant une âme à sauver » !

Ce fut le départ d'une oeuvre splendide qui devait grandir rapidement et à laquelle il sut gagner toute une pléiade de collaborateurs dévoués. Chaque samedi, au retour de ses tournées d'affaires, on l'avait vu se consacrer à sa chère école et à l'évangélisation. Pourrait-il faire longtemps marcher de pair ces deux choses?
Écoutons-le raconter lui-même à la suite de quelles luttes et dans quelles circonstances il sortit de l'indécision :
«Je n'avais jamais perdu de vue Jésus-Christ depuis le jour de ma rencontre avec Lui dans mon magasin de Boston. Mais, pendant plusieurs années, je n'imaginais pas que je pourrais jamais travailler pour Dieu. Personne ne m'avait demandé de faire quoi que ce soit pour Lui. À mon arrivée à Chicago, je louai des places à l'église et J'allai repêcher des jeunes gens dans les rues. je ne leur parlai pas de leur âme, pensant que c'était la tâche de personnes plus autorisées. Puis, après avoir fait cela quelque temps, je fondai une École du dimanche il me fallait beaucoup d'élèves : je visais au nombre. Lorsqu'il augmentait, j'étais enthousiaste. S'il diminuait, quelle angoisse ! Mais aucun de mes élèves ne se convertissait. Il ne pouvait y avoir de moisson.

Dieu enfin m'ouvrit les yeux. Certain dimanche, Je dus remplacer le moniteur d'un groupe de jeunes filles, pour la Plupart assez frivoles. Elles me riaient au nez au point que je fus près d'aller ouvrir la porte et de les inviter à sortir, avec prière de ne plus revenir.

Dans le courant de la semaine, le moniteur vint prendre congé de moi. Il se savait gravement atteint et devait rentrer dans sa famille. Son angoisse me frappa.
- Je n'ai, amené, me dit-il bientôt, aucune des élèves de mon groupe à Jésus-Christ. Je crois que j'ai fait plus de mal que de bien.

C'était la première fois que j'entendais quelque chose de ce genre. Cela me fit réfléchir. Je lui demandai
- Si vous alliez leur dire comment vous êtes ? Je vous accompagnerai.

Il y consentit. Je vécus alors l'une des meilleures journées de ma vie. Nous visitâmes l'une des jeunes filles. Il lui parla de son âme. Certes, elle ne songeait plus à rire, mais se mit plutôt à pleurer. Ensuite, il lui Proposa de prier et me demanda de le faire. À la vérité, c'était là du nouveau pour moi : prier Dieu de convertir quelqu'un sur le champ ! Mais nous priâmes et Dieu nous exauça.

D'autres visites suivirent, chaque jour, tant que ses forces le lui permettaient. Au bout d'une huitaine, il revint le visage rayonnant.
- M. Moody, me dit-il, la dernière de mes élèves s'est décidée ; elle s'est donnée à Christ.

Il devait partir le lendemain soir. Je convoquai le groupe pour une réunion de prières et Dieu alluma dans mon âme, ce soir-là, une flamme qui ne s'est plus jamais éteinte. Mon ambition avait été d'être un commerçant heureux, et si j'avais su que cette soirée devait me faire changer d'avis, peut-être bien que je n'y serais pas allé. Mais que de fois J'ai béni Dieu depuis lors !

Ce soir-là, le moniteur était assis au milieu de son groupe. Il parla et lut le chapitre XIV de saint jean. Nous essayâmes de chanter, puis nous nous agenouillâmes pour la prière. Au moment où je me relevais, l'une des élèves commença à prier pour celui qui allait les quitter, puis une autre, puis une autre encore, enfin toutes. 0 Dieu, me dis-je en sortant, que je meure plutôt que de perdre la bénédiction obtenue ce soir ! ... »

Dès ce moment, la nécessité d'un choix s'imposa. La lutte, Moody l'avoue, fut rude. Il avait réussi à mettre de côté une somme de huit à dix mille dollars, à peu près le double de son gain annuel. Il venait de se fiancer. Il n'avait aucune préparation au ministère pastoral. Nul comité ne devait soutenir son oeuvre. Tous ses aides étaient bénévoles. Il faudrait vivre de ses économies... Et combien de temps cela pourrait-il durer D'autres questions encore surgissaient pressantes...

Mais une fois la volonté de Dieu clairement manifestée, plus de compromis. Il obéit et fut tout à l'oeuvre du Maître.
- Alors, de quoi vivrez-vous ? lui demandèrent ceux à qui il annonça cette décision.
- Dieu y pourvoira ! répondit-il.

En dehors de tous cadres établis, dans une complète incertitude du lendemain, poussé par le désir de travailler au sauvetage d'enfants malheureux et abandonnés, Dwight-L. Moody, ayant entendu, comme jadis Abraham, l'appel de Dieu, partit sans savoir où Il le conduirait.

Évangile et salle de danse

Peut-on décrire cette marche vers l'inconnu et les faces de l'activité, véritablement prodigieuse, qui, dix-sept années durant, devint celle du jeune évangéliste ?

Distribuer des traités, inviter les passants à entrer dans l'église, tenir des réunions sur les places et au coin des rues, telle est, au début, sa mission. il lui faudra amener les enfants à son École du dimanche, les aller voir chez eux, gagner leurs parents. C'est là risquer de vives oppositions, ou s'exposer à plus d'une rencontre désagréable, voire dangereuse, parce qu'un tel travail contrecarre inévitablement les intérêts des débitants d'alcool et des exploiteurs du vice. Sans se laisser effrayer par les menaces, le néophyte désarme les plus violents par la ténacité de son amour, par l'ardeur et la sincérité de sa foi. Rien ne l'arrête. Au bout de peu de temps, tout le quartier le connaît ; les enfants lui font cortège. Certes, les cultes sont bruyants, car il a devant lui une bande de sauvages, mais qu'importe ! On peut toujours essayer de leur apprendre un chant ou une prière : il en restera bien quelque chose ! De chacun d'eux l'Évangile ne peut-il pas faire un homme nouveau ?

Le nombre croissant des élèves exige un local plus spacieux que le café abandonné et délabré où il s'est installé. Le maire l'a autorisé à utiliser le dimanche la salle de danse de North-Market, mais il faut, chaque fois, la balayer, la remettre en ordre, ce qui n'est pas petite affaire. Il lui faut des aides et de l'argent ; qu'à cela ne tienne : il ne s'agit que de chercher les uns et que de trouver l'autre ! Tout le jour en courses, il lui arrivera de loger dans une chambre de débarras, de dormir sur un banc, de sauter à pieds joints l'heure des repas. Mais tel est le rayonnement de son zèle et de sa bonté qu'après avoir souri et haussé les épaules en le voyant passer sur son petit cheval, après l'avoir appelé «ce toqué de Moody », on parlera de son oeuvre avec respect et l'on fera appel à sa collaboration ; mieux encore, la bénédiction qui repose manifestement sur cette activité rejaillira sur les Églises qui, par elle, reprendront vie.

Extrait d'une lettre à sa mère (juin 1861):
«Depuis huit mois, j'ai assisté tous les soirs sauf deux à ma réunion de prières. Le Seigneur m'encourage, et je crois que tu me dirais : « Dieu te bénisse, va de l'avant !». Toute la semaine dernière, j'ai été pris par des assemblées générales des Écoles du dimanche ; c'est la même chose cette semaine et ce sera encore la même chose la semaine prochaine. Tu vois que je suis occupé comme jamais encore. Partout, nombreux auditoires. La semaine dernière, salle comble, les gens se pressaient dans la rue, si bien qu'il fallut tenir deux réunions au lieu d'une. Le Seigneur m'a béni. On m'a demandé de revenir. 0 mère ! si tu étais ici, jamais tu ne regretterais que je me sois retiré des affaires. D'ailleurs, si je ne l'avais pas fait, il est probable qu'à l'heure qu'il est j'aurais tout perdu, car, à peu d'exceptions près, toutes les grandes maisons de chaussures ont fait la culbute»...

Plus le caractère des garçons attirés à ses réunions se montrait difficile, et plus leur moniteur s'attachait à eux, certain que la grâce de Dieu pouvait en faire des hommes nouveaux. À treize des plus turbulents, il avait promis de donner à la Noël un vêtement neuf pour prix de leur régularité durant l'année. Sauf une exception, tous remplirent les conditions requises et reçurent la récompense. De ce groupe furent prises deux photographies : dans l'une on portait des haillons, dans l'autre un «complet» neuf. Sur la première on voit Moody écrire : «Vaut-il la peine ?» et sur l'autre : «Oui ! cela vaut la peine ! ». Car ce furent ces garçons-là qui devinrent la «garde de corps» de leur chef. Longtemps après cet épisode, l'un d'eux fut interpellé par un employé de gare :
- Vous ne me reconnaissez pas?
- Non.
- Eh bien ! vous souvenez-vous de la garde de corps du brave M. Moody?
- Certes, j'en ai gardé la photographie.
- Et bien ! alors, une fois chez vous, cherchez le plus laid de ces garçons et vous aurez votre humble serviteur ! Maintenant je suis un chrétien pratiquant et même j'ai succédé à M. Moody dans son oeuvre...

Enfants de la rue rassemblés par Moody à Chicago.
CELA VAUT-IL LA PEINE?

 

Première classe d'École du Dimanche dirigée par Moody à Chicago.
OUI CELA VAUT LA PEINE!

À la conquête des âmes

Si l'École du dimanche a été la première passion de Moody, la seconde fut l'Union chrétienne de jeunes gens. Il s'y était rattaché à Boston déjà. Et rien d'un feu de paille : à cette cause il restera toujours fidèle.

Après l'essor rapide des débuts, la Y.M.C.A. (2) de Chicago, fondée à la suite d'un réveil (1857-58), demeurait en veilleuse. Moody sut lui insuffler une vie nouvelle. Relevant d'abord la réunion quotidienne de prières pour en faire un foyer commun à toutes les Églises de la ville, il présida à la construction d'un bâtiment plus vaste et mieux aménagé qui devait permettre à la jeune association d'étendre considérablement son effort. Entretenir une piété vivante restait son principal objectif. Mais, pour avoir été en contact avec la misère, nul mieux que lui ne pouvait comprendre combien il faut aider matériellement aussi ceux qui souffrent, et créer en leur faveur des conditions d'existence normales : en ce domaine, il connaissait la valeur du relèvement par le travail. C'est pourquoi on le verra, toujours infatigable, multiplier démarches et appels. Certain jour de l'an, il fit, avec des amis, plus de deux cents visites, apportant dans chaque foyer quelque secours, prononçant des paroles cordiales accompagnées d'une courte et fervente prière.

Glanons dans le vaste champ d'expériences de ces années de formation quelques faits qui permettent de suivre le développement de sa personnalité déjà singulièrement attirante.

D'abord, son courage à aborder les inconnus et à leur présenter l'Évangile, ainsi que son discernement des esprits. Parfois, il semblait lire dans les coeurs.
Un jour, son attention est attirée par un promeneur qui passe et repasse en voiture près du lieu de ses réunions et manifeste pour de telles pratiques le plus complet dédain.

Le lendemain, même scène. Moody s'informe, apprend qu'il s'agit d'un incrédule notoire et annonce son intention de l'aller voir. Ses amis cherchent à l'en dissuader. Peine perdue ! il se rend chez l'incrédule et l'interpelle :
- J'apprends que vos affaires sont prospères, je vois que vous avez une belle maison, une femme et des enfants charmants. Mais, à toutes les bénédictions de Dieu, vous ne répondez que par des malédictions et des blasphèmes. Je viens vous demander pourquoi vous traitez ainsi mon Maître ? ...

L'autre aurait pu s'emporter. Bien au contraire, il accueille favorablement l'interpellateur. Et, dès qu'ils sont seul à seul, on l'entend murmurer :
- Tout ce que vous avez dit est juste. J'ai tout pour être heureux, mais l'impiété me possède...

Quelques instants plus tard, tous deux sont à genoux et Dieu exaucera leur prière.
Trente ans après, à l'issue d'une réunion en Californie, un auditeur se présente à Moody.
- Me reconnaissez-vous ?
C'était l'ancien blasphémateur gagné à l'Évangile.

Ensuite, sa largeur d'esprit. Il ira chez tous, n'ayant qu'un but : amener les âmes au Christ. Rien. en lui du sectaire ; le prosélytisme ecclésiastique lui fera toujours horreur. Qu'importent les étiquettes ! Il faut voir avant tout, dans l'homme, une âme créée à l'image de Dieu. Qu'on en juge par un exemple :
Les cultes de North-Market étaient fréquemment troublés par de mauvais garnements. S'en étant plaint, sans succès, au prêtre catholique dont ils étaient les paroissiens, Moody voulut en référer à l'évêque. Celui-ci était fort occupé ; on refusa l'audience demandée.
- D'accord, déclara tranquillement Moody, qui prit place dans le vestibule, j'attendrai que Sa Grandeur puisse me recevoir.

Le dignitaire de l'Église étant enfin visible, notre visiteur lui exposa les faits et réclama son appui. L'évêque se déclara incapable, à son grand regret, de mettre fin au désordre.
- Votre zèle et votre piété sont très louables, ajouta-t-il, mais si vous voulez devenir une puissance pour le bien, il ne vous reste qu'une chose à faire : revenir à la seule et véritable Église ! ...
- En ce cas, riposta Moody, tout l'avantage que j'aurais à travailler parmi les catholiques serait perdu : je ne pourrais plus m'adresser aux protestants, car vous ne me laisseriez certainement pas prier avec eux !
- Si fait, vous le pourriez comme auparavant.
- Et vous-même, prieriez-vous avec un protestant?
- Oui, répondit l'évêque.
- En ce cas, reprit Moody, je vous demande de prier avec moi.

Sans tarder, évêque et évangéliste s'agenouillèrent côte à côte. Une amitié naquit qui dura toute la vie... et les cultes cessèrent d'être troublés !

Enfin, sa fidélité. Bien des gens trouvaient impertinente cette façon d'aborder le prochain à toute occasion. Quelqu'un en fit l'observation :
- Un homme à qui, dans la rue, vous avez brusquement demandé s'il était chrétien ou non a bien failli vous gifler.
- De qui s'agit-il ?

Un nom fut donné.
- Et bien, reprit Moody, l'homme dont il s'agit est en passe de devenir l'un de mes meilleurs amis. Baptisé, puis reçu dans l'Église pas plus tard que dimanche, il fait dater la crise qui s'est produite en lui du jour où je lui ai posé mon «impertinente question !».

De même, l'inlassable bonté de l'évangéliste parlait en sa faveur et lui gagnait la sympathie de gens, qui jugeant les choses du dehors, avaient pu le qualifier de faiseur de miracles, voire de charlatan.
- Je ne crois pas à votre Moody, déclarait un médecin, je le tiens pour un imposteur.

Quelque temps plus tard, l'esculape reprit:
- Je vous avais dit n'avoir pas confiance en votre homme. Aujourd'hui j'ai changé d'avis. Et voici pourquoi : appelé au chevet d'une mourante, malheureuse créature qui avait vécu dans le désordre, je reçus d'elle une montre et des bijoux avec prière de les faire parvenir à sa fille unique qu'elle n'avait pas revue depuis des années et dont personne, sinon M. Moody, ne connaissait l'existence. J'obtins son adresse et lui écrivis de venir à Chicago recueillir ces objets. Frappé de sa bonne apparence, je lui demandai sans ambages comment elle avait pu échapper à la lamentable destinée de sa mère.
- Tout enfant, me répondit-elle, J'étais élève de M. Moody. C'est lui qui supplia ma mère de me soustraire aux dangers de la grande ville. M. Moody m'emmena bien loin de Chicago et me confia à la famille d'un de ses amis. Dans ce milieu chrétien j'ai grandi, j'y ai été bénie, et maintenant j'ai moi-même un heureux foyer. Ce bonheur, après Dieu, vous voyez à qui je le dois ! ...

Moody à 25 ans.

Table des matières

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1. Dénommés aussi «Frères larges»
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2. Y. M. C. A. = Young Men's Christian Association ou Union chrétienne de jeunes gens. Sur les débuts des U.C.J.G. lire «George Williams, pionnier des Unions chrétiennes de jeunes gens», collection «Le Phare», N° 14. (Éditions «Le Phare», B-5531 Flavion-Florennes, Belgique)

 

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