LA PALESTINE AU TEMPS DE
JÉSUS-CHRIST
CHAPITRE XIII
LES ARTS ET LA LITTÉRATURE
L'architecture - Les
beaux-arts. - La musique. La
littérature. - Son caractère
principal. - Les Psaumes (le Salomon. Les
Oracles Sybillins. - Le livre
d'Hénoch. - L'assomption de
Moïse. - Le livre des Jubilés.
- Les Targoums. - Le quatrième
livre d'Esdras.
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M. de Saulcy a écrit un gros volume
in-8 intitulé : l'Art judaïque
(1), dans lequel
il cherche à montrer que les Juifs ont
été injustement accusés
d'avoir méprisé les arts et
d'être restés, à cet
égard, dans une situation
d'infériorité écrasante parmi
les peuples de l'antiquité. Il parcourt les
écrits bibliques, les ouvrages de
Josèphe et d'autres encore ; il
étudie les restes grandioses de monuments
antiques, épars çà et
là en Palestine, surtout ceux de
Jérusalem et des environs, et il lui est
facile de prouver que les Juifs ont beaucoup
construit et qu'ils ont bâti de fort beaux
monuments. Il ne s'agit en effet, dans ce livre de
M, de Saulcy, que de l'architecture, et il ne peut
s'agir d'autre chose. Ce qu'on appelle proprement
les beaux-arts, c'est-à-dire la peinture et
la sculpture, a toujours été en
abomination chez les Juifs. Il leur était
défendu par la Loi « de se faire aucune
image taillée, ni aucune
représentation des choses qui sont en haut
dans les cieux, ni ici-bas sur la terre, ni dans
les eaux plus basses que la terre
(2). » Il
suffisait de telles paroles pour qu'il ne fût
question chez eux ni de
sculpture, ni de peinture. Ils faisaient des
bas-reliefs représentant des fruits, par
exemple la vigne colossale sculptée sur le
Temple : ils gravaient sur leurs monnaies des
vases, des fleurs; mais des figures d'hommes ou
d'animaux, ils n'en ont jamais fait, ils ne
pouvaient pas en faire. Avaient-ils au moins le
sentiment du beau dans les arts ? Rien ne le
suppose, et leur foi religieuse avec ses
défenses formelles n'était pas propre
à le leur donner. Le sentiment de la
beauté artistique était
répudié par eux comme une atteinte a
la piété et même aux bonnes
moeurs.
Ils ont connu l'architecture et l'ont
pratiquée, mais il n'y a pas eu, à
proprement parler, d'architecture judaïque. Si
Hérode le Grand a beaucoup bâti, il
est, certain qu'il imitait, dans ses constructions,
les monuments grecs et romains, L'art grec en
particulier, a exercé une grande influence
sur l'architecture (lu Temple, que ce prince fit
élever sous son règne. Les Juifs
aimaient beaucoup cet édifice, mais ils
semblent en avoir plus admiré les
énormes proportions que la beauté
artistique et, du reste, d'après ce que nous
savons de cette construction, elle devait
être gigantesque à la fois et laide
lourde et prétentieuse, d'un luxe de mauvais
aloi. Le Temple n'était certainement qu'un
pastiche de l'art grec et nullement une imitation
sérieuse, une intelligence copie de ses
merveilleux monuments. « Maître,
disaient un jour les apôtres à
Jésus; vois, quels murs! quelles
constructions !
(3) » Et,
Jésus leur dit : « Est-ce là ce
que vous regardez ? » Ils étaient
frappés par les proportions lions, par
l'énormité, par la masse des pierres
gigantesques qui avaient été
réunies. En général, les Juifs
ignorent la beauté du détail, ce qui
est fin, délicat, joli, leur échappe.
Ils ne comprennent que ce qui les domine et les
dépasse, ce qui est grandiose et même
écrasant
(4).
Il en était ainsi en
poésie. L'Ancien Testament renferme de bien
beaux passages poétiques ; mais tous offrent
le même caractère; la beauté
est cherchée dans la grandeur, dans
l'immensité. Le poète juif excelle
à décrire la tempête et Forage;
mais il ne connaît pas la nature sous un
autre aspect. Sa beauté calme et sereine lui
échappe ; il n'y a point de description
simplement gracieuse dans les livres de l'ancienne
alliance. Cette prédilection pour la
peinture des grandes scènes de la nature,
à l'exclusion de toute autre, s'était
encore développée dans les
siècles qui ont précédé
l'apparition du christianisme. Les contemporains de
Jésus-Christ ont décrit, non sans
éloquence, l'avènement de
l'ère messianique, mais toujours de la
même manière, en parlant des
éléments
déchaînés, de la chute des
astres,' de l'embrasement de la terre. La
littérature était ici en
étroit rapport avec l'état des
esprits qui vivaient dans une fièvre
continuelle. La fougue pathétique d'un
Jean-Baptiste, l'éloquence âpre et
violente des fragments de ses discours qui nous ont
été conservés, peut nous
donner une idée de toutes les
prédications messianiques de cette
époque. On accumulait les images ; on
exagérait à plaisir ; on supposait
des villes construites toutes entières en
pierres précieuses, des portes faites avec
une seule perle. Certaines pages de l'Apocalypse de
Jean nous donnent une juste idée de ces
peintures forcées où l'on amassait
toutes les richesses du monde d'une part, et de
l'autre toutes les horreurs que l'on pouvait
imaginer.
Mais la littérature ne se
réduisait pas uniquement à
prédire l'avenir, et nous pouvons mettre en
parfait contraste avec cette éloquence des
tribuns populaires le style des Talmuds, qui est
froid, didactique, sans couleur. Le Rabbi, docteur
de la Loi, s'exprimait en
phrases brèves, nettes, précises. Les
aphorismes et les antithèses se
rencontraient fréquemment dans ses discours.
Il obéissait en cela au génie de la
langue hébraïque qui n'a point de
période, et qui exclut le raisonnement et la
discussion ; le Rabbi donnait son enseignement en
petits proverbes, courts, sentencieux et souvent
énigmatiques.
Enfin, dans cette rapide revue des
diverses formes littéraires du premier
siècle, il ne faut pas oublier la parabole.
L'enseignement en paraboles est la seule preuve
d'imagination que nous aient laissée les
scribes, et encore n'imaginaient-ils pas beaucoup.
Ils tiraient leurs comparaisons des usages
ordinaires de la vie, sans se permettre aucun
développement étranger à
l'enseignement moral et religieux qu'ils
prétendaient donner.
Il nous reste sept des ouvrages que les
Juifs ont composés au temps de
Jésus-Christ : les Psaumes dits de Salomon ;
des fragments des Oracles Sybillins; le Livre
d'Hénoch; l'Assomption de Moïse; le
Livre des Jubilés ; les Targoums et le
quatrième livre d'Esdras. Nous allons
essayer d'en donner une idée succincte
à nos lecteurs : ils ont une importance
capitale pour l'histoire des idées
religieuses à cette époque. Nous
avons fait cette étude dans notre premier
ouvrage et ne parlons ici de ces livres qu'au seul
point de vue littéraire,
Les Psaumes de Salomon ont
été écrits en l'an
soixante-trois avant Jésus-Christ. Cette
année avait été
néfaste. Pompée était
entré dans le Temple, avait
pénétré jusque dans le Saint
des Saints et l'avait profané de sa
présence. La douleur des Juifs avait
été immense et l'un d'entre eux, dont
le nom est resté inconnu, a exprimé
son indignation en composant dix-huit psaumes
(5),
imités de ceux de David, et qu'il place
lui-même dans la bouche de Salomon; il
suppose que ce roi a prophétisé
d'avance, dans ces cantiques désolés,
la profanation dont
Pompée vient de se rendre
coupable. L'idée est belle et n'est pas
exprimée sans grandeur; mais ces
poèmes sont trop courts pour que l'auteur
puisse entrer dans de très grands
développements sur l'ère
messianique.
Il n'en est pas de même des
Oracles Sybillins
(6). Ici le Juif
se donne libre carrière et exhale sa douleur
ou ses espérances en longues apostrophes
d'une extraordinaire véhémence.
L'origine des Oracles Sybillins est des plus
bizarres. L'auteur fait parler la Sybille
païenne ; il lui fait prédire la
grandeur future du peuple élu. Les Juifs,
qui se faisaient du faux en littérature une
assez singulière idée, usaient de ce
procédé pour convertir les
païens. lis leur apportaient ces
prétendus oracles et, les faisant passer
pour authentiques, leur disaient :
«Voilà ce qu'ont écrit vos
auteurs; vous voyez qu'ils nous rendent justice.
Vous devez donc vous convertir à notre
religion; vos prophétesses elles-mêmes
rendent hommage à sa vérité et
à son origine divine. » Nous ne savons
si ce pieux stratagème réussissait;
il est probable que oui, et plus d'un
prosélyte a dû être gagné
au judaïsme par cette supercherie. Les
chrétiens ne se firent non plus aucun
scrupule d'employer ce mode de propagande et ils
répandaient, sous le nom de lit Sybille, des
poésies fabriquées par eux qui
engageaient les païens à se convertir
au christianisme. Athénagore, Justin,
Clément d'Alexandrie et surtout Lactance ont
cru très fermement à
l'authenticité de ces prétendus
oracles et ils s'en servaient pour montrer aux
païens que le christianisme avait
été prédit par les
prophétesses païennes.
Les fragments d'Oracles Sybillins juifs
qui nous ont été conservés,
sont d'origines fort diverses. La fixation des
dates est parfois assez compliquée, et les
critiques qui se sont occupés de cette
question sont souvent en complet désaccord.
Sauf quelques passages certainement
antérieurs au christianisme et quelques
autres certainement postérieurs, l'ensemble
est d'une époque
impossible à déterminer avec
exactitude, d'autant plus impossible que ces
fragments ont subi de nombreux remaniements. Des
huit livres sybillins que nous possédons, le
troisième seul est incontestablement
antérieur à Jésus-Christ. La
caractéristique générale des
révélations qu'il renferme est la
même que toutes celles de cette
époque. Le voyant ne parle plus comme les
anciens prophètes ; ceux-ci ne s'occupaient
que du peuple juif et de ses voisins
immédiats. Leur horizon politique ne
dépassait pas l'Egypte et l'Assyrie ; mais,
depuis le retour de l'exil, le Juif a appris
à connaître les grands royaumes qui se
partagent le monde et à compter avec eux.
Les conquêtes des Perses, celles d'Alexandre
ensuite et enfin celles des Romains le
préoccupent vivement. Il sent que l'avenir
de la Palestine est étroitement lié
à l'avenir de ces immenses empires. Il
embrasse donc du regard le monde entier. De plus,
il n'écrit plus des prophéties
proprement dites, mais des apocalypses, des
révélations ; ce n'est plus Dieu qui
parle par sa bouche, c'est lui-même ou
plutôt son héros qui a une
série de visions et auquel un ange montre ce
qui doit arriver, révèle ce qui se
passe dans le ciel et ce qui se passera sur la
terre ; tous les ouvrages sur le Messie
écrits par des Juifs, sans exception, depuis
l'apocalypse de Daniel jusqu'à celle de
Jean, offrent ce caractère.
S'il est curieux à observer dans
les imprécations de la Sybille, il l'est
plus encore dans le prétendu livre
d'Hénoch
(7), Cité
par Jude (8) ce
livre était certainement lu par les Rabbis
du premier siècle et commenté avec
autant de soin que l'apocalypse de Daniel.
Nous ne l'analyserons pas, car il a
déjà été en
français l'objet d'études
détaillées
(9) ; et nous
l'avons longuement utilisé nous-mêmes
dans notre Histoire des idées religieuses en
Palestine au premier siècle. Il se compose
d'une succession de visions fantastiques, où
l'auteur se laisse emporter par son imagination
à toutes les extravagances. Hénoch
voyage dans le ciel et sur la terre; il est en
relation avec toits les esprits célestes, il
traite des lois de la nature aussi bien que de la
venue du royaume de Dieu. Si l'écrivain a
choisi Hénoch pour héros de son
épopée, c'est tout simplement parce
que ce patriarche avait été
enlevé au ciel
(10) et qu'il
était fort naturel de lui supposer une
connaissance remarquable de ce qui se passe dans le
monde invisible
(11). Le style
de cet ouvrage est chargé outre mesure; ses
images sont exagérées; tout y est
plus grand que nature. Il répond donc bien
à l'idée générale que
nous nous sommes faite d'un des genres
littéraires de cette époque.
Le livre de l'Assomption de Moïse
est aussi cité par Jude
(12). Le
législateur des Hébreux raconte
l'histoire du peuple à
Josué. Le passage le plus
curieux est celui où il fait allusion
à l'intervention armée de Varus,
après la mort d'Hérode le Grand,
crucifiant deux mille insurgés
(13). Ce fait
se passait au moment même de la naissance de
Jésus. Les peintures qui suivent sur les
persécutions dont les Juifs sont l'objet et
sur l'ère messianique sont faites dans le
goût du temps, c'est-à-dire qu'elles
sont ampoulées, exagérées,
fantastiques.
Le « livre des Jubilés
» ou « Petite Genèse » ou
encore « Apocalypse de Moïse
(14) » est
aussi de la même époque; il fut'
écrit, pendant la vie de Jésus ou
fort peu de temps avant sa naissance. Il n'est pas,
à proprement parler, apocalyptique. Il se
rapproche davantage par son contenu de la
littérature talmudique, car l'auteur ne fait
guère que paraphraser le livre de la
Genèse. Cependant il ne parle pas
lui-même, mais fait parler un ange qui
s'adresse à Moïse, et, par ce
détail, il se rapproche des apocalypses. Il
prend pour base de ses développements
historiques, la période de 49 ans,
composée de sept semaines d'années;
tous les sept ans vient l'année sabbatique,
dite du jubilé, de là le nom de
l'ouvrage. L'auteur est très au courant de
la hiérarchie céleste, et nous voyons
par ses développements sur ce sujet quelle
place les spéculations sur les anges et
autres êtres intermédiaires tenait
dans les préoccupations des Juifs
contemporains de Jésus. Il enseigne que les
anges ont longtemps observé la Loi. dans le
ciel avant qu'elle eût été
donnée aux Hébreux, car elle
était écrite sur des tables
célestes. Les patriarches auraient eu aussi
des livres secrets renfermant des doctrines
révélées
(15).
Les Targoums
(16) sont des
paraphrases de l'Ancien Testament telles qu'on les
faisait à la synagogue chaque jour de
sabbat. Il est prouvé aujourd'hui que ceux
que nous possédons n'ont été
rédigés qu'au quatrième ou
cinquième siècle après
Jésus-Christ
(17), mais il
en existait de semblables au premier siècle;
ceux que nous avons en sont la reproduction plus ou
moins exacte. La Mischna parle de paraphrases
chaldaïques
(18) et les
auteurs du Nouveau Testament citent parfois
l'Ancien Testament dans les termes mêmes des
Targoums (19).
Il est évident que ces traductions nous
offrent le travail de plusieurs
générations. Nous avons deux
Targoums, celui d'un certain Onkelos sur le
Pentateuque et celui d'un nommé Jonathan sur
les Prophètes. Le premier n'est guère
qu'un mot à mot péniblement fait ; le
second, au contraire, a les allures les plus
libres. Tous deux se distinguent par le soin qu'ils
mettent à éviter les
anthropomorphismes de l'Ancien Testament et
à faire parler l'ange de l'Éternel au
lieu de Jéhovah lui-même
(20).
L'apocalypse d'Esdras
(21) ou
quatrième livre d'Esdras est aussi un
écrit juif de la fin du premier
siècle ou du commencement
du second. Quelques critiques le
croient plus tardif encore. Ce livre se trouve dans
la Vulgate et il est, par suite, beaucoup plus
connu que les ouvrages dont nous avons
déjà parlé. Les Juifs
donnaient le nom de second livre d'Esdras au livre
de Leur troisième livre d'Esdras
était une assez pauvre compilation de
passages bibliques et l'ouvrage dont nous allons
parler se trouvait naturellement porter le nom de
quatrième livre d'Esdras.
Il s'agit encore ici de visions que ce
scribe célèbre est censé avoir
dans la ville de Babylone. Cette apocalypse est, au
point de vue littéraire, très
supérieure à toutes les autres. Le
style en est élevé, sérieux et
d'une sobriété remarquable pour
l'époque. L'auteur a beaucoup d'imagination,
mais elle n'a rien de fantastique. Il s'exprime
parfois en paraboles, et plusieurs sont charmantes
de finesse et de simplicité. Écrit
après la ruine de la ville sainte, ce livre
traite la question brûlante que tout Juif
croyant se posait alors : Israël n'est-il donc
plus le peuple élu ? L'auteur ne perd pas
espoir et il annonce, avec une foi
inébranlable la venue prochaine du Messie.
Il se trompait comme tous ses devanciers, et la
révolte suprême des Juifs sous Trajan
et Hadrien devait avoir pour résultat
l'anéantissement définitif dit
dernier vestige de nationalité qu'ils
possédaient encore ; mais l'auteur (lu
quatrième livre d'Esdras n'aurait pas
conseillé ce soulèvement. Il
appartenait à celle tendance
modérée dont les; partisans allaient
remplacer l'espérance messianique par
l'observation de la Loi, et dire : - Le royaume de
Dieu est venu si vous êtes fidèles,
car il est dans vos coeurs ; il est
réalisé spirituellement par tout
sectateur sincère du mosaïsme. - Les
apocalypses ont fini leur oeuvre. Celle d'Esdras
est la dernière qui mérite
d'être mentionnée et la
littérature purement talmudique sera
désormais l'unique préoccupation des
Rabbins.
Ces divers écrits que nous venons
de passer en revue, datant tous de la même
époque et offrant tous ce fond
commun : la prédiction
apocalyptique de l'avenir, nous montrent qu'il
existait, chez les Juifs du premier siècle,
à côté des scribes ne pensant
qu'à la Loi, des hommes plus
indépendants, uniquement
préoccupés de l'avenir et fabriquant
des prophéties placées ensuite par
eux sous le patronage et la protection des
héros du passé. Il est probable que
ces livres s'écrivaient dans l'ombre, en
dehors du monde officiel. L'auteur se cachait pour
lancer son ouvrage. Après sa publication, il
gardait encore l'incognito et, la
crédulité aidant, quelques
années suffisaient pour que le livre
passât pour authentique et fit fortune. Quant
à son écrivain, tout faussaire qu'il
était, sa conscience le laissait fort
tranquille. Il avait le sentiment très net
d'avoir rendu service à son peuple en lui
rappelant ses destinées prochaines, et ne se
reprochait absolument rien, car il était
convaincu de n'avoir placé dans la bouche de
son héros que des vérités
essentielles à dire, et qu'il aurait
volontiers dites s'il avait écrit des
prophéties. Peut-être même
voyait-il dans son incognito un
désintéressement méritoire? Il
ne songeait pas à lui, à sa gloire
personnelle, il ne songeait qu'à son peuple,
à ses glorieuses destinées, à
Jéhovah dont il servait la cause. Pour lui,
il s'effaçait entièrement. Il
prêchait ce qu'Hénoch, Moïse,
Salomon, Esdras auraient certainement dit, avaient
dit peut-être, il. ressuscitait un
passé sublime, il reprenait les grandes
traditions prophétiques, il était,
à sa manière, un héros et un
continuateur de l'oeuvre commencée par les
voyants des anciens âges.
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