En ce temps-là, la Bible

No 72
J. DHEILLY

 

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Un anonyme, dernier prophète de l'Ancien Testament

Les quatre livres prophétiques appelés en dernier dans l'ordre traditionnel ne sont Pas eux non plus classés selon la chronologie; et c'est sans doute cinq auteurs inspirés qu'il faudrait présenter ici, car le plus long de ces ouvrages a pour lui seul deux auteurs au moins, et de deux époques. Mais le temps et les noms des messagers ont bien pou d'importance en regard des « paroles d'éternité» du message.

La prédication de SOPHONIE se situe au Vlle siècle avant notre ère, sous Josias : quelques années avant la réforme religieuse du pieux roi, donc entre 640 et 625. A Isaïe, ce prophète a emprunté l'idée de l'abaissement de l'orgueil humain, qu'il combine avec le thème du « Reste », déjà proposé par Amos. Il aboutit ainsi à la perspective que « le royaume » comprendra seulement les « pauvres de Yahvé » (en hébreu : anawim). Mais. pour en arriver là, il fait passer l'idée de pauvreté du plan sociologique (absence de biens) au plan spirituel : le pauvre est celui qui reconnaît sa misère intérieure devant la richesse de Dieu; celui qui, dans l'épreuve, accepte la volonté divine sur lui. tout en demandant au Seigneur son salut.

AGGÉE, ZACHARIE et MALACHIE sont d'un autre âge : tous trois ont exercé leur mandat au retour de l'Exil; les deux premiers vers 520 av. J.-C., le troisième vers 450. Aggée et Zacharie sont orientés vers la reconstruction du Temple; ils chargent leur message d'espérance messianique et voient la réalisation de celle-ci à travers Zorobabel, prince descendant de David et chef civil de la communauté juive renaissante en Judée


En ce temps-là, la Bible

No 61 page IV.
P. CRISOLIT

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"Un autre s'installe" dans la vie du prophète

Le message le plus éloquent des prophètes est le témoignage de leur vie. Serviteurs de la Parole, Ils ont fait l'expérience d'une rencontre. Tous ont pu dire : Un autre s'installe dans ma vie et dispose de moi.

La Révélation dont sont bénéficiaires ceux que Dieu a choisis pour parler en son nom n'est pas ressentie d'abord comme l'énonciation d'une idée, pas même comme la communication d'un esprit, mais bien plutôt comme la découverte de « l'Autre »: le divin partenaire à qui ils sont livrés avant de devenir les dépositaires de son message.

Aucune image ne s'impose comme pleinement satisfaisante pour exprimer ce qui survient. Chacun en risque cependant une nouvelle. Pour Amos, Dieu et le prophète tiennent l'un à l'autre comme le lion à sa proie et l'oiseau à son piège (chap. 3, vers. 3-8). Osée a tenté une description plus précise : celle de lutteurs qui s'empoignent, évoquant le mystérieux combat de Jacob avec l'Ange au gué de Jabboq (GENESE, chap. 32, vers. 24-26). Jérémie, lui, compare sa rencontre avec Dieu à celle des amants : « Tu m'as séduit, Yahvé, et j'ai été séduit; tu as été plus fort que moi, et tu l'as emporté » (chap. 20, vers. 7).

Il devient parfois sa propre contradiction


Promesses

1991 - 1 / No 95
«Actualités évangéliques», décembre 1989

avec la permission de Paul Ranc, éditeur


Texte intégral

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Un prophète pour secouer les gens pieux

Un prophète, c'est connu, n'est pas populaire, surtout dans son pays. Les prophètes de l'AT, toujours à l'affût d'une infidélité, avaient fort à faire avec le peuple d'Israël. Sans cesse, et à tous les niveaux, ces serviteurs de Dieu hors du commun ont rappelé les exigences de Dieu et de sa loi, dénoncé avec vivacité le péché et proclamé avec ardeur le pardon de Dieu pour quiconque s'humilie et croit. Mais le peuple a préféré suivre les faux prophètes.

De nos jours, les prophètes sont rares. Le ministère de prophète tel que l'AT l'enseigne n'existe plus, car la révélation est complète. Nous entendons par «prophète» un homme choisi par Dieu et qui est porteur d'un message particulier (repentance de l'Eglise, réveil). Ainsi William Booth, le fondateur de l'Armée du Salut, est considéré comme un prophète des temps modernes (G. Brabant, «William Booth», éditions «Je Sers», Paris, 1929). Le prophète ne peut, en aucun cas, prédire l'avenir ou compléter la révélation. Son message s'adresse uniquement à l'Eglise, c'est-à-dire aux croyants, et son contenu est le rappel de la loi de Dieu, autrement dit, de la volonté pour son peuple.

Les responsables du peuple d'Israël ne brillaient pas pour leur fidélité. Esaïe les compare à des chiens muets! Ses gardiens sont tous aveugles, sans intelligence; ils sont tous des chiens muets, incapables d'aboyer; ils ont des rêveries, se tiennent couchés, aiment à sommeiller (Es 56.10). Un chien qui n'aboie pas quand le danger est là n'est plus un chien! Le parallélisme avec nous est saisissant. Nous laissons au lecteur le soin d'aller plus loin dans ses réflexions... et, peut-être, d'aboyer!

Une chose est évidente: L'Eglise a besoin de prophètes pour secouer les «gens pieux», pour leur rappeler que Dieu est un Dieu trois fois saint et que sa volonté est immuable et éternelle. Dieu ne veut pas que son peuple soit dans l'ignorance, mais soit au contraire rendu intelligent. L'apôtre Paul le dit clairement: Ne vous conformez pas au monde présent, mais soyez transformés par le renouvellement de l'intelligence, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu: ce qui est bon, agréable et parfait (Rom 12.2).

Si Dieu nous donne une intelligence renouvelée, c'est pour s'en servir! Et réfléchir. Les apôtres étaient des hommes de réflexion. Ils savaient tenir un discours, réfuter les erreurs de leur temps et exposer les vérités chrétiennes.

L'Eglise a tenu des siècles durant à tous les assauts de l'Ennemi parce qu'elle comptait en ses rangs des docteurs (connaisseurs et enseignants de la Parole) et des apologètes qui savaient prendre les armes de la Parole et de l'Esprit pour réfuter les fausses doctrines. Tout combat chrétien exige, qu'on le veuille ou non, un sérieux effort de réflexion. De là débouchent nécessairement l'action et l'engagement. Réfléchir avant, agir ensuite, et non l'inverse!

Si les chrétiens se mettent à réfléchir, à «réflexionner» bibliquement, alors l'Eglise connaîtra véritablement un renouveau spirituel.


En ce temps-là, la Bible

No 62 pages III-IV
Dom J. GOLDSTAIN

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VRAIS ET FAUX PROPHETES

Les prophètes bibliques entrent souvent en conflit avec ceux qu'ils estiment être de faux prophètes : menteurs, fanfarons, hommes sans foi (SOPHONIE, chap. 3, vers. 4), parfois adultères ou ivrognes (JÉRÉMIE, chap. 23, vers. 14, chap. 29, vers. 23; ISAIE, chap. 28, vers. 7), ou encore hommes d'argent qui brandissent la menace de guerre si on ne les paie pas (MICHÉE, chap. 3, vers. 5-11 ), courtisans adulateurs du roi ou du peuple (ISAIE, chap. 30, vers. 10, JÉRÉMIE, chap. 5, vers. 31 ; MICHÉE, chap. 2, vers. 11 ). Par leurs fallacieux oracles ces imposteurs endurcissent les méchants dans leur perversité (JÉRÉMIE, chap. 23, vers. 14; ÉZÉCHIEL, chap. 13, vers. 22); ils les entraînent à oublier le nom de Dieu (JÉRÉMIE, chap. 23, vers, 27); ils égarent le peuple (JÉRÉMIE, chap. 23, vers. 22; chap. 29, vers. 8; ÉZÉCHIEL, chap. 13, vers. 10). Il valait donc de se garder de tels messages... et d'abord de ceux qui las portaient.

Sauf le cas très exceptionnel où un « mauvais » fut, comme Balaam par exemple (Nombres, chap. 23-24), contraint de transmettre la Parole de Dieu, l'orthodoxie de l'enseignement habituel constituait en Israël le critère majeur permettant de discerner ce qui venait vraiment d'En-Haut.

Les "bons" sont souvent des prophètes de malheur"

Le bavard est suspect


En ce temps-là, la Bible

No 3 1 pages I-II.
Dom Jacques GOLDSTAIN

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L"AGE D"OR sous le grand roi d'Israël

Le règne de Salomon, sur lequel revient l'auteur des Chroniques avec une complaisance proche de celle qu'il accorde à celui de David, apparaît dans la Bible comme l'apogée de l'histoire humaine d'Israël. C'est un très court moment de gloire sereine, longtemps préparé et bien vite évanoui, une sorte d'âge d'or avant la difficile période du schisme et de l'exil. D'une certaine manière, tous les courants de l'histoire antérieure convergent vers cette instauration d'une royauté assurée, d'un royaume pacifié, d'un Temple somptueux et d'une prospérité sans ombre, vue à distance du moins, avant les abus de la fin du règne.

Si Salomon est appelé, selon l'étymologie de son nom, la Pacifique, c'est sans doute que sous son règne on ne connaîtra plus ces interminables guérillas de bandes semi-nomades qui défrayent la chronique dans les premières années de la vie politique de David; c'est encore qu'il n'eut pas à faire, de tout son règne glorieux, de véritables guerres; c'est enfin que chaque Israélite vécut alors sous sa vigne ou sous son figuier et que cette prospérité matérielle constitue l'aspect le plus tangible de la paix hébraïque selon la Bible : en hébreu, la racine d'où est tiré le mot de « paix » signifie originellement plénitude. Alors qu'en temps de guerre tout risque de manquer, il y a « paix » lorsque rien ne manque.

Dans tout le pays : une spiritualité intense


En ce temps-là, la Bible

No 26 pages I-II.
Dom J. GOLDSTAIN

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La fin d'un grand règne

Le règne de Salomon fut d'un brillant éclat mais, nos lecteurs le savent, des crises graves l'ébranlèrent au cours de ses dernières années, et dès la mort du grand monarque son royaume va se briser. Aux yeux de l'historien, deux groupes de i( causes » expliquent ces événements. Les unes, politiques, tiennent à l'étendue des conquêtes, à l'impossibilité de contrôler toutes les frontières, et aussi au (i double jeu » diplomatique de certaines puissances voisines, particulièrement de l'Egypte. Les autres, d'ordre économique et social, sont dues à une évolution trop rapide qui avait fait d'une communauté encore patriarcale et paysanne un état fortement administré et absolutiste, et d'une petite province, un grand empire. Ce ne sont pas les seules raisons. Il en est d'un tout autre ordre.

La politique de grandeur qui est incontestablement celle de Salomon excédait de beaucoup les ressources nationales. Pour y parer, Salomon développa au maximum les échanges avec l'étranger mais aussi multiplia taxes et impôts. Il fut finalement prisonnier de l'organisation administrative qu'il avait imaginée. Les « fermiers généraux » s'attribuèrent à eux-mêmes les rentrées qui auraient dû revenir au trésor national. Faute de moyen pour payer suffisamment d'ouvriers libres pour réaliser ses grands projets de construction, Salomon dut non seulement aggraver la corvée des Cananéens autochtones, mais étendre le système aux Israélites eux-mêmes.

Le prince de la sagesse devient roi de la folie

Le prophète: conscience vivante du roi et du peuple


En ce temps-là, la Bible

No 50 page IV.
J. DHEILLY

Professeur à l'institut catholique de Paris


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Le "pessimiste" Ecclésiaste trouve dans sa foi une raison de vivre

Comme la traduction grecque des Septante, la Vulgate place l'Ecclésiaste parmi les livres poétiques et sapientiaux, entre le livre des Proverbes et le Cantique des Cantiques: là où nos lecteurs retrouveront dans les pages qui suivent. Très officiellement admise par l'Église en ses conciles, l'authenticité de son inspiration divine fut jadis discutée par les rabbis de la tradition juive. Elle ne l'est plus. La Mishna, partie du Talmud où se trouve codifié l'enseignement des maîtres, précise que ce livre « souille les mains», c'est-à-dire qu'il convient de se laver les mains après l'avoir touché, comme il est prescrit de la faire après tout contact avec un objet sacré c'est donc bien que l'Ecclésiaste est considéré comme tel.

Personne ne pense plus aujourd'hui que cet ouvrage ait été véritablement écrit par Salomon, ainsi qu'a pu le laisser croire pendant des siècles l'interprétation littérale du texte, qui fait parler « le fils de David ». Les experts modernes discernent dans la composition au moins trois mains différentes de celle d'un auteur principal qui écrivit vraisemblablement au Ille siècle avant notre ère. Quoi qu'il en soit, il s'agit d'un véritable petit chef-d'oeuvre où la philosophie du bon sens se pigmente de satire ou d'ironie et sert parfois de grands élans de piété sincère et de foi.

Sans doute l'auteur principal apparaît-il pessimiste : il a fait le tour de toutes les expériences humaines et en revient déçu, désabusé.

Ni sceptique, ni agnostique, et encore moins athée

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